Avec une réalisation intimiste et sans le moindre commentaire, ce docu (j'aurais tellement aimé pouvoir dire docu-fiction, vraiment) vous montre la vie d'Américains évangéliques (merci @knock_knock !), menant leur combat quotidien pour qu'éclate enfin la Vérité. Leur vérité.
Apprêtez-vous à faire face à ce que vous verrez de plus convaincant dans le domaine de la misère intellectuelle, de l'obscurantisme et du rejet de l'autre, compressé en 1h30 de votre vie.
Cette oeuvre n'a pas vocation a être impartiale. Elle est à charge puisque votre cerveau ne pourra le voir qu'ainsi.
Vous verrez des enfants de 6 à 10 ans chantant et dansant sur un thème martial, maquillés en combattants, luttant contre des ennemis invisibles : l'ouverture d'esprit, la connaissance, le sens critique.
Devant, sur l'estrade, des adultes jurant qu'ils ne faut pas ouvrir d'autres livres que leur Livre sacré, que tout ce qu'il faut savoir s'y trouve, et rien d'autre n'a d'importance.
Pourtant non, vous n'êtes pas devant un reportage de TF1 présentant d'obscurs barbus dans une quelconque dictature, où la misère aura poussé l'humain à se créer un réflexe grégaire, vous êtes face à la jeunesse du pays le plus riche et le plus développé au monde. Face à la nation au-dessus des nations, face au futur d'un pays qui domine le monde.
C'est avec une criante soif de pouvoir que ces hommes et ces femmes, dans des églises de la taille du Zénith, mélangent un discours politique et religieux, expliquant avec le sourire aux lèvres que ce sont eux qui détiennent le pays entre leurs mains, utilisant la démocratie comme ils utilisent leur jeunesse.
Cette jeunesse qui entend de l'âge de 0 à 10 ans que l'avortement est l'oeuvre du diable, et que rien ne peut et ne pourra jamais le justifier. Ces enfants « manifestant » devant la maison blanche sur des thèmes pro-life, sans avoir même idée de l'importance d'un tel sujet. Ces putains de gamins qui, si on leur avait dit l'exact opposé, seraient en train de lever leur poing pour une cause toute autre. De pathétiques marionnettes qui le resteront toute leur vie.
Comme pour vous permettre de respirer, on vous montre de temps à autres un homme, chrétien aussi, devant le micro d'une station radio, répondant aux appels téléphoniques façon Docteur Love. Tentant de partager sa vision tolérante de sa religion et les risques de l'extrémisme, cet homme parle. Mais on ne l'écoute pas.
On comprend bien vite que les questions qu'on lui pose n'attendent pas de réponses de sa part. Chaque intervenant n'appelle que pour prendre la parole et crier encore plus fort son étroitesse d'esprit. On a de la peine et de l'admiration pour cet homme, qui sait qu'il n'a pas les moyens de faire réfléchir ces moutons (le termes est brebis, dans le jargon), aveuglés par ces séances de prières dominicales aussi passionnées que grotesques, où chacun essaye de meugler et d'avoir des spasmes plus forts que son voisin, histoire de montrer que Jésus est plus dans son corps que dans le tien – c'est moi qui ai la plus grosse – Amen.
Après le visionnage, respirez profondément et retenez tant bien que mal l'aigreur qui vous envahit devant la disparition de ce qui vous restait de considération pour l'espèce humaine.
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