Denys Arcand a réalisé avec ce film une très belle actualisation des Évangiles dans le contexte d'un Québec fortement déchristianisé. La fiche qui suit est davantage une fiche de lecture qu'une critique à proprement parler. Car pour saisir toute la profondeur et la finesse de ce film, il faut avoir une solide culture biblique. D'où la série de questions que je pose pour inciter à la recherche. Même si le spectacle de la Passion fait revivre d'une manière très belle certaines scènes évangéliques, c'est dans la vie quotidienne de Daniel, le metteur en scène du spectacle de la Passion et l'acteur qui joue le rôle de Jésus, que l’Évangile s'incarne d'une manière implicite.


Prix du jury au Festival de Cannes 1989, prix du jury œcuménique au même festival, prix Génie du meilleur film canadien en 1990. Un film dramatique de Denys ARCAND (Canada, Québec) avec Lothaire BLUTEAU, Catherine WILKENING, Rémy GIRARD, Johanne-Marie TREMBLAY et Robert LEPAGE.


L’intérêt de ce film consiste à susciter une réflexion sur la société et l’Eglise contemporaines. Il y a du vrai et du faux dans ce film du point de vue de la foi catholique (cf. Luc 1, 1-4 et Jean 19, 35 ; 21, 24.25). On ne peut comprendre la présentation qui est faite de l’Eglise dans ce film sans se référer à la profonde crise qui a ébranlé et ébranle encore aujourd’hui l’Eglise du Canada et particulièrement du Québec. Chute de la pratique religieuse (fréquentation d’un lieu de culte plus d’une fois par mois) entre 1987 et 1998 : de 39% à 26% des québécois. La conséquence de cette baisse spectaculaire de la pratique est la réaffectation des églises à des usages profanes : bibliothèques, centres de loisirs, appartements en copropriété, et même bars ou discothèques, comme à Shawinigan (Christ-Roi) et à Hull (Our Lady of the Annunciation). C’est ainsi qu’à Rimouski, dans le Bas Saint-Laurent, trois des neuf églises paroissiales seront fermées au culte dès le 2 janvier 2008 : Saint-Yves, Sainte-Odile et Nazareth. A Joliette, capitale de la région de Lanaudière, près de Montréal, la municipalité vient de transformer l’église Saint-Pierre-Apôtre en bibliothèque. Le chantier a débuté en août 2006 et a duré un an, représentant un investissement de six millions de dollars canadiens. D’autres lieux de culte qui n’étaient plus utilisés, comme l’église St. Matthew à Québec, ont également été transformés en bibliothèques.


§ Pour guider notre réflexion je vous propose les questions suivantes :


1ère : Quel est le rapport entre la première et la dernière scène ?
2ème : Quel est l’itinéraire que les acteurs de la Passion de Jésus ont parcouru entre le début et la fin ? Peut-on parler d’une conversion ?
3ème : Quels sont les travers, les péchés et les vices de notre société qui sont montrés ou dénoncés dans ce film ?
4ème : Peut-on dire que l’acteur qui joue le rôle de Jésus s’identifie à Jésus ? Si oui, quels en sont les indices concrets ?
5ème : Dans ce film il y a un essai évident pour un œil averti et attentif d’une actualisation de certaines scènes évangéliques dans notre monde contemporain. Ces scènes sont à chercher en dehors du spectacle de la Passion (qui est essentiellement une représentation et non pas une actualisation).
Cf. Matthieu 4, 18-22 et Luc 5, 27.28 : l’appel des premiers disciples
Matthieu 21, 12-17 (Jean 2, 13-22) : Jésus chasse les marchands du temple
Matthieu 4, 8-10 : Jésus est tenté par Satan au désert
Matthieu 10, 17-20 (Luc 21, 12-15) et Matthieu 27, 11-14 (Jean 19, 8-11)
Matthieu 26, 56.69-75 ; 27, 55.56 (hommes et femmes par rapport à Jésus)
Matthieu 24, 1-31 (discours eschatologique de Jésus)
Matthieu 16, 13-20 ; 18,18 (rapport entre Jésus et l’Eglise)
6ème : En quoi la conversation entre Ponce-Pilate et Jésus est-elle intéressante ?
7ème : Quel est le rapport entre les miracles de Jésus et les « miracles » de la science ?
8ème : Que peut-il sortir de positif d’une confrontation entre la foi chrétienne et le message de ce film ?

NB : D.ARCAND est né à Deschambault (Québec) en 41. On lui doit aussi en 1986 Le déclin de l’Empire américain, en 2003 Les invasions barbares et en 2007 L'Âge des ténèbres.


Point de recherche 1 : La lecture, l’étude et l’interprétation de la Bible ont évolué au cours des siècles. L’EXEGESE BIBLIQUE aujourd’hui plus qu’hier est traversée par différentes tendances. Dans le film la mise en scène de la Passion du Christ se fait l’écho de l’une de ces tendances. Quelques pistes de recherche : les Pères de l’Eglise ; Richard SIMON (1638-1722) ; Ernest RENAN (1823-92) ; Alfred LOISY (1857-1940) ; l’exégèse historico-critique ; le problème de l’historicité des évangiles (cf. les deux références bibliques de mon introduction : Luc 1, 1-4 et Jean 19, 35 ; 21, 24.25) ; la position du Concile Vatican II (Constitution Dei Verbum nn°9-20, spécialement les nn°11.12 et 19). Autres pistes : Le Contre Celse d’ORIGENE et les dossiers historiques du livre d’aumônerie des 6èmes (Jésus, qui est-il ? pages 113-126).


Point de recherche 2 : Histoire du christianisme et de l’Eglise au Québec. Les premiers missionnaires (les jésuites français du 17ème siècle dont les saints martyrs Jean DE BREBEUF et Isaac JOGUES). Pour le 20ème siècle rechercher des statistiques religieuses (évolution du nombre des séminaristes, des prêtres, des religieux et religieuses, de la pratique dominicale etc.).


Point de recherche 3: Lecture, étude et présentation des récits évangéliques de Pâques.
Cf. Matthieu 28, 1-20
Marc 16, 1-20
Luc 24, 1-49
Jean 20, 1- 21, 25


Point de recherche 4 : Lecture, étude et présentation du discours eschatologique (ruine de Jérusalem et fin des temps) de Jésus en Matthieu 24, 1-31. Etablir le lien avec ce que « Daniel-Jésus » proclame dans le métro à la fin du film.

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le 3 févr. 2016

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