Etonnamment, Jeune et innocent est le dernier film d'Alfred Hitchcock à apparaître sur les écrans de salles françaises en 1978, à peine deux avant sa mort et deux ans après son dernier film Complot de famille. Soit plus de quarante ans après sa sortie initiale !
Le film est un grand classique du réalisateur anglais dans le sens où il reprend une des trames classiques de son oeuvre, de nombreux gimmicks et effets de style. Il pourrait passé inaperçu après l'Homme qui en savait trop, les 39 marches et Agent secret.
Mais c'est sans compter sur les atouts charme et action qui pimentent ce film.
Le duo d'acteurs principaux fonctionne à merveille après des débuts hésitants où l'on peut être décontenancer par les réactions de l'héroïne et ne pas croire à leur histoire naissante.
Ils sont malgré tout justes dans leur jeunesse, leur innocence, leur certitude, leurs convictions. Ils soutiennent l'intrigue et on finit par être emporter dans leur histoire impossible.
Les seconds rôles sont quelque peu éclipsés et anecdotiques comme la tante suspicieuse, le père chef de police. Seul Will le vagabond attire notre sympathie et réussit à prendre sa place dans le récit.
Malgré sa courte durée, le récit est satisfaisant et nourri de rebondissements successifs qui rythment l'action. Très peu de temps morts, servant juste à rapprocher les personnages ou à ajouter des enjeux à l'histoire.
La réalisation s'affirme lors des scènes d'action et de suspense comme la scène de la découverte du corps sur la plage avec le cri et plan de la mouette que l'on peut associer aux Oiseaux ou la scène de course poursuite en voiture suivie de celle de la mine. L'héroïne tenue par le bout des doigts du héros alors qu'elle est suspendue dans le vide préfigure la fameuse scène du mont Rushmore dans la Mort aux trousses.
Mais la performance visuelle la plus marquante du film est pour moi le plan séquence qui est un exceptionnel travelling avant de la salle de bal de l'hôtel qui part d'un plan large des danseurs sur la piste pour terminer en gros plan sur le fameux "tic" du batteur du groupe de jazz qui anime la salle. Il est d'une technicité et d'une précision redoutables. Le maître utilisera cet effet de style à d'autres reprises dans sa filmographie.
Les grands motifs d'Hitchcock sont présents également : l'innocent embarqué dans une machination, le couple forcé avec une femme au fort tempérament.
On ne s'ennuie pas, on sourit et on visionne une petite pépite de la fin de la période anglaise d'Hitchcock. A découvrir.