"Etre... ou ne pas être ?" Hé, ne partez pas !
On connaît tous la célèbre réplique de Hamlet tiré de son soliloque : "Etre ou ne pas être ? Telle est la question". Quand Ernst Lubitsch s'en empare en pleine seconde guerre mondiale... ça donne un résultat époustouflant. Tout est présent pour faire de "Jeux dangereux" un chef-d'oeuvre : les répliques sont subtiles et font mouche à chaque coup ; les acteurs sont excellents, surtout les époux Tura et le colonel Ehrhardt (ce regard dans lequel on lit toute la fureur (sans mauvais jeu de mot) d'avoir été trompé....).
Certaines scènes sont mémorables : Joseph Tura déguisé en Siletsky et sa discussion avec le colonel Ehrhardt, le jeune aviateur qui sort de la salle à la tirade d'Hamlet, et même, dans un genre plus engagé, la réplique de Shylock dite par un des résistants polonais : "Et si vous nous empoisonnez, ne mourrons-nous pas ?". Et ce serait oublier l'entrée en matière, grandiose : "Mais que fait donc Hitler à Varsovie ?" avec le petit commentaire par-dessus.
Quelques passages ont même fait naître chez moi des réflexions shakespeariennes : "Le théâtre c'est la vie, et la vie c'est le théâtre". Les deux tendent en effet à se confondre : utilisation de déguisements, besoin pour les personnages de faire appel à leur talent d'acteur, mort sur scène de Siletsky. On note un petit côté vaudeville (mari qui se croit trompé, retournements de situation comiques) qui se marie étonnamment bien avec le cadre historique de la Seconde Guerre Mondiale.
Bref, on rit de bout en bout devant cette magnifique satire du nazisme ("Sautez ! - Oui, mein Führer !") huilée à l'humour grinçant. Indéniablement, "Jeux dangereux" est un film qui mérite sa place au rang des grands classiques du septième art.