L’idée d’une œuvre peut naître d’une peur, à tout le moins d’une appréhension... Un peu comme lorsque Bashung, interrogé sur le caractère souvent triste des épisodes amoureux évoqués dans ses chansons, répondait, dans un sourire : « Vous savez, je peux aussi écrire ces histoires pour qu’elles n’arrivent pas... ».
Antoine de Maximy, concepteur, filmeur et héros constant de l’émission « J’irai dormir chez vous », passe à la fiction en imaginant que l’un de ses reportages dérape. Celui, précisément, qui le conduisait dans les Carpates, aux abords du château du Comte Dracula. Accident de voiture, plongeon dans une rivière, disparition du corps. Seule la valise contenant les précieuses cassettes vidéos enregistrées au cours du reportage est ramenée à Paris. Agnès (Alice Pol, toujours très convaincante), la fidèle monteuse d’Antoine, entreprend un dérushage précis, à la recherche d’indices pouvant jeter une lumière sur cette disparition : soit authentique accident, soit conséquence d’une malveillance, pouvant alors justifier une enquête. La jeune femme est secondée dans cette démarche par un enquêteur dévoué (Max Boublil, parfait dans le rôle) mais peu soupçonneux, contrariée par son supérieur et agacée par un jeune stagiaire prétentieux qui ne cesse de s’agiter à côté d’elle...
Fidèle au climat de ses reportages, entre insouciance aventureuse et humour discret, Antoine de Maximy exploite ici, de façon plus populaire et moins intellectuelle, la thématique qui travaillait l’immense « Blow-Up » (1966), d’Antonioni, ou encore le non moins impressionnant « Meurtre dans un jardin anglais » (1982), qui propulsa la carrière de Greenaway : l’image comme témoin involontaire et inconscient, donc à décrypter, et précisément témoin d’un meurtre, même si l’intrigue va ici se révéler à coulisse...
Le tout nous emmène sur les traces du sympathique globe-trotter qui n’hésite jamais à se précipiter vers une nouvelle aventure, à la manière d’un Buster Keaton du tourisme. On y croisera bien le redoutable Comte aux canines pointues et ses chauve-souris, mais le plus carnassier et buveur de sang ne sera pas non plus forcément celui auquel on s’attendait...
Reste à espérer que cette joyeuse fiction saura conserver son caractère apotropaïque et ne se révélera pas prédictive !