Contrairement à ce que peut laisser sa note plutôt moyenne de 5,9 sur ce site, Joe Kidd est un western tout à fait honorable, et agréable à regarder. Dirigé par le grand John Sturges, dont il constitue l'avant-dernière incursion dans le genre, il met en scène Clint Eastwood dans son rôle habituel de cow-boy taciturne à la gâchette facile. Sauf que cette-fois ci, il n'a ni poncho sur les épaules, ni de cigare au bec, mais il a un nom. Et comme toujours, c'est un type qu'il ne faut pas emmerder : il le fait d'ailleurs bien comprendre à l'un de ses compagnons de cellule dans une des premières scènes du film !
Ce bon Joe Kidd est recruté comme guide par Frank Harlan (Robert Duvall), un riche propriétaire terrien arrivé en ville avec une bande d'hommes de main armés jusqu'aux dents, pour abattre Luis Chama (John Saxon). Celui-ci, un local d'origine mexicaine, s'est enfui dans les montagnes avec ses compañeros après avoir réclamé auprès du juge de Sinola, de manière assez spectaculaire faut-il le dire, que les titres de propriété de ceux qui vivent ici depuis des générations soient enfin respectés par les colons américains, récemment arrivés sur ces terres.
Sur fond de questionnement existentiel sur la justice (ce qui est légal vs. ce qui est bien), Joe Kidd nous emmène dans une grande chevauchée aller-retour au cœur des sublimes espaces sauvages du parc national de Yosemite, à la poursuite de Chama. La première rencontre intervient dans un village de montagne isolé, doté d'une magnifique petite église peinte. Kidd, évincé par Harlan, retourne alors sa veste et s'allie aux Mexicains. Le deuxième face-à-face a lieu à Sinola, là où tout a commencé, et offre, outre une fusillade spectaculaire, l'entrée fracassante d'un train en ville, ainsi qu'un magnifique exemple de justice personnelle rendue par Clint... depuis le fauteuil du juge. Tout un symbole !
En à peine 1 h 30, on n'a guère le temps de s'ennuyer. Clint nous régale de ses talents pour la bagarre, que ce soit avec une casserole, ses mains, le canon d'un fusil utilisé comme matraque, une jarre à eau, un fusil à lunette ou son bon vieux six-coups ! Face à lui, le toujours juste Robert Duvall campe à la perfection une belle ordure de propriétaire terrien, très ricain dans l'esprit, préférant rendre lui-même la justice. Les Mexicains - ou plutôt, les citoyens américains d'origine mexicaine - s'avèrent finalement bien sympathiques dans leur quête de respect. Enfin, les divers hommes de main pleins de morgue et de suffisance se font bien latter la gueule par Clint : que demander de plus ?
Bref, Joe Kidd mérite plus que ce médiocre 5,9, d'autant plus que le film bénéficie d'une bande-son sympathique due à Lalo Schiffrin, et surtout - comme dans tous les westerns de Sturges - de jolis décors urbains et de paysages naturels grandioses, superbement filmés et mis en valeur par une photographie lumineuse et un TechniColor chatoyant. Ce n'est pas le meilleur western de Clint, ni de Sturges, mais ça vaut quand même sacrément le coup d'œil !