Critique John Dies at the End : c'est pas ce que vous croivez !
Cela fait dix ans maintenant, depuis le crépusculaire Bubba-Ho-Tep pour être précis, que nous n’avions pas de nouvelles de Don Coscarelli. Du moins pas au cinéma puisque le monsieur s’est rappelé à notre bon souvenir en 2005 en signant l’un des meilleurs épisodes de l’anthologie Masters of Horror. De projets avortés en fausses annonces, ce maestro sous estimé et touche à tout (chef op’, scénariste, monteur ne sont que quelques unes de ses qualifications) s’est longtemps fait désirer (peut être trop même) mais pas au point de quitter le cœur des aficionados à jamais marqué par la saga Phantasm. Mais comme toutes les bonnes choses ont besoin de fermenter c’est plus en forme que jamais qu’il nous revient avec John Dies at the End. Contrairement à nombre de ses congénères qui se sont soient fait bouffer par le rouleau compresseur hollywoodien (Sam Raimi) ou qui rament inlassablement pour finalement atterrir directement dans les rayons vidéos avec des œuvres efficaces mais mineures (John Carpenter, Joe Dante), Coscarelli lui semble n’avoir rien perdu de son panache d’antan. Mieux, avec son nouveau film, il creuse encore davantage les sillons explorés tout au long de sa filmographie et les alimente de nouvelles et fascinantes pistes de réflexion. Irracontable (au très bon sens du terme), John Dies at the End est un voyage horrifico psychédélique suivant deux glandeurs ayant eu la mauvaise idée d’ingérer une substance pas très casher ! Et pour ceux qui se poseraient la question : non Coscarelli n’accouche pas d’un plaidoyer anti ou pro stupéfiant mais d’une œuvre bicéphale, mutante et totalement perchée ! Fourmillant d’idées toutes plus dingues les unes que les autres (comptez une dizaine par minutes !), John Dies at the End est une sorte d’odyssée hallucinée et hallucinante repoussant toujours plus loin les limites de l’entendement.
Dis comme ça, le résultat s’annonce pontifiant et beaucoup trop cérébral mais il y a un élément que Coscarelli n’a pas omis de distiller : le fun. Plus comédie que film d’horreur, John Dies at the End fait preuve d’une distance bienvenue avec son sujet sans que cela se fasse au détriment de son ambiance d’inquiétante étrangeté. Un peu comme si David Lynch co réalisait un film avec les Monty Python ! En gros, imaginez un mix sur vitaminé entre Donnie Darko, Las Vegas Parano et La Quatrième Dimension. Vous n’aurez alors qu’une toute petite idée des surprises que vous réservent cette pelloche qui vous embarque dès les premières minutes pour ne plus jamais vous lâcher au point de vous laisser totalement exsangue, voire épuisé ! C’est peut être le seul reproche qu’on pourrait reprocher au film qui ne (nous) s’accorde presque aucun moment de respiration quitte à parfois laisser le spectateur au bord de la route tant la cadence qu’il a amorcé est rapide. Mais pour peu que vous acceptiez de régler votre pas sur celui de Coscarelli, l’expérience ne peut que se révéler réjouissante en particulier pour ses fans auxquels le cinéaste fait ostensiblement du pied en disséminant ici et là quelques références bien senties.
A la question : le créateur de Phantasm est il mort ? John Dies at the End répond par un non franc et massif. Mieux, il prouve que le maitre a su se renouveler, se nourrir de ce qu’il a pu voir et entendre pendant dix ans pour en ressortir une oeuvre à la croisée des chemins, consciente d’elle même mais aussi du spectateur mais surtout jamais cynique ! Un voyage fortement conseillé pour peu qu’un distributeur se penche sur ce drôle de cas et prenne le risque de le sortir en mieux en salles, au pire en vidéo. L’un dans l’autre la prescription s’avérerai salutaire. OFNI totalement décalé, John Dies at The End est un bien beau bras d’honneur à la notion même de méta film cynique. Une expérience autre mais tellement réjouissante et drôle !