Il ne faut pas être drôle pour être humoriste ?
Arthur est un humoriste raté qui devient graduellement un furieux psychopathe.
Au lieu de se contenter de réaliser simplement un récit sur les origines d’un célèbre antagoniste d’un super-héros, Todd Phillips, pourtant davantage accoutumé aux comédies potaches, mais qui semble se révolter contre un genre dans lequel on l’a cloisonné, met en scène un métrage montrant un personnage incompris, méprisé à cause de sa vulnérabilité, un homme pratiquement esseulé et nourri par l’amertume des laissés-pour-compte, proscrit et persécuté par une société malade et nihiliste. Même si c’est avant tout l’étude psychanalytique d’un individu, c’est aussi un véritable brûlot macabre envers les médias, les élites politiques et le rêve américain qui se mue en cauchemar violent. Quant à son handicap, son rire involontaire, il s’apparente parfois à des sanglots. Les dialogues recèlent de pépites d’humour noir telles « Ma mère est morte. Je fête ça » et cruel comme le nain qui ne parvient pas à atteindre la chaînette d’une porte. Joaquin Phoenix livre une prestation véritablement inquiétante, voire dérangeante. Bref, l’atteinte ultime au frivole studio Marvel et un spasme de sagacité hollywoodien provenant d’une œuvre magistrale, éthérée et foncièrement subversive.