Je l'avais vu à sa sortie et j'étais de ces gens totalement fan, l'adorant, dansant sur ces musiques chez moi, riant et mémorisant ces répliques du bout des doigts.
Mais très vite, le soufflé est tombé et j'ai fait face à tout ces défauts. Un peu dans la mise en scène mais surtout dans son scénario et sur ma conception du Joker.
On va commencer par les qualités du film
Joaquin Phoenix a fait un excellent travail d'acteur pour devenir Arthur Fleck. Je n'irais pas forcément applaudir la perte de poids ( que tout le monde encense comme la quintessence du bon jeu d'acteur ) mais je félicite cependant la façon d'avoir pu recréer le rire de ce joker, si mythique, et imitant le rire chronique du syndrome pseudo-bulbaire.
Dans un sens plus large, tout les acteurs font un bon boulot et joue bien.
J'adore la composition musicale d'Hildur qui permet d'iconiser certaines scènes. Transition toute trouvée pour dire que la photographie et que la mise en scène, dans son ensemble, est très bien faite et propose des scènes iconiques ( la danse des escaliers, celle après son premier meurtre ou le léger zoom sur son regard qui se crispe avant de se déchaîner sur les poubelles )
Mais les défauts existent et ils sont nombreux et pas négligeables ...
Si j'aime bien la mise en scène, elle manque parfois cruellement de subtilité. Deux exemples : Quand on apprend que la relation entre Arthur et la voisine était faux, le film revient sur toutes les scènes pour nous expliquer lourdement ce qu'on avait parfaitement compris. La seconde se trouve quand la famille Wayne quitte le cinéma et qu'un criminel inconnu les suit, rappelant lourdement la scène de meurtre qui n'a aucun impact ( balayé en fin de film ) et qui n'était qu'un moment de trop ( on aurait pu laisser le plan sur le mec qui les regarde ou, au pire, le plan sur l'ombre de cet inconnu qui s'étend sur le mur, parfaitement explicite pour celui qui connaît un minimum Batman )
La politique est traitée de façon très immature. Sans être économiste, on ne peut pas traiter les inégalités salariales en faisant des riches les méchants et les pauvres les gentils qui ont le droit de tuer les gens. Et mettre le Joker dedans est un non-sens car le Joker n'est pas une figure politique !
Mais mon plus gros problème concerne l'écriture de ce Joker :
1. Tout les meurtres à l'écran, orchestré par ce Joker, sont motivés par le ressentiment et la vengeance alors que le Joker est du genre à tuer sans aucune motivation de ce genre. Et quand on avait l'occasion de proposer un meurtre "gratuit" ( proposant alors une graduation, de meurtres motivés à gratuits ), avec le collègue nain et la voisine, il se défile ( le réalisateur affirme en interview que la voisine est toujours en vie )
2. Les motivations de ce Joker sont bien trop terre à terre. Ce qui fait que le Joker est le Joker, selon moi, c'est qu'il a des objectifs que son environnement ou le spectateur ne pourrait cerner ou comprendre ( celui de Nicholson décide d'empoisonner la foule dans le défilé après avoir voulu descendre les gars de la Pègre ; Celui de Ledger veut prouver son hypothèse comme quoi tout le monde peut sombrer dans la folie ; Jeremiah Valeska de Gotham cherche à aménager la ville pour qu'elle devienne celle qui fera naître le Batman ). Lui veut simplement se venger de ceux qui lui ont fait du mal.
PS : Il argumente son fait en disant qu'ils étaient immondes/awful et je trouve que ce n'est tellement pas "Joker" ( j'aurais plus attendu un truc comme "J'ai tué ces gars-là parce qu'ils étaient ennuyeux" )
3. La qualité du comics "The Killing Joke", dont le film estime s'en inspirer, c'est que "Jack" est un Monsieur-Tout-Le-Monde qui aurait pu éviter d'être le prince du crime. Hors, Arthur Fleck est bien trop inadapté socialement ( maladie, passif psychiatrique, relation malsaine avec sa mère, solitude, hallucinations ... ), ce qui montre qu'il était déjà condamné à mal finir ( et donc moins attachant, en un sens ), rappelant déjà qu'il deviendra le Joker ( avec sa carrière de comique ou son rire ) et presque illogique étant donné qu'on explique jamais pourquoi il n'avait pas craqué avant
4. L'idée de dire qu'il est méchant à cause des autres m'énerve parce que c'est renier que le Mal naît des autres, mais aussi ( pour ne pas dire surtout ) de soi. Là, c'est Gotham qui le méprise puis le porte comme symbole et Arthur suit le mouvement. Il n'est plus du tout le génie du crime ou quelqu'un qui "prendrait les commandes". Il est difficile à croire, en le voyant, qu'il puisse devenir le Clown-Prince du Crime qui va terroriser la ville et donner du fil à retordre à Gotham
5. Ce point-là est gratuit, et pour une pub, mais quand je peux proposer une origin story à ce personnage et des objectifs plus fidèles au Joker dans mes fanfictions, ça la fout mal ...
Pour conclure, Joker est finalement une belle coquille vide, un extérieur attractif et intéressant mais un intérieur plus bancal. Totalement infidèle à ce que j'attends du méchant que j'aime tant ...
Bon, pour alléger l'ambiance, je vous raconte une blague :
- Toc Toc
- Qui est là ?
- C'est la police M'Dame ! On a fauché votre fils, on voulait vous rendre sa tête ...