En préambule il me parait nécessaire de clarifier un point qui a tout de même son importance : malgré un titre plus qu’évocateur et mis à part quelques petites références (Gotham, Wayne…) semées à droite et à gauche, le film n’a en réalité que très peu de rapport avec l’univers habituel de Batman. L’intrigue se déroule dans l’ambiance hyper réaliste d’une métropole qui ressemble un peu à New York à la fin des années 70 avec un « héros » qui est un pauvre type en souffrance psychique comme on en croise malheureusement tous les jours dans le métro. Il n’y a aucune dimension fantastique, les personnages n’ont pas de supers pouvoirs et pour finir on n’y rencontre évidemment pas d’homme chauve-souris.
Bon maintenant qu’on a planté le décor, intéressons-nous d’avantage aux qualités artistiques d’une œuvre qui ne manque pas d’ambition et lorgne bien plus du côté de Taxi Driver de Scorsese que de celui des Comics. Est-il à la hauteur du film qu’il prend en modèle ? La réponse sans surprise est non. Est-il décevant au vu du battage médiatique dont il fait l’objet ? Clairement oui. Est-il un navet pour autant ? Non.
Les points forts du film sont évidents mais, à mon sens, surtout formels : l’ambiance et les décors sont très réussis. C’est glauque, déprimant, mais vraiment très réussi. Les acteurs aussi sont très bons. Quoique l’on puisse penser du personnage du Joker dans son écriture, Joaquin Phoenix fait le boulot et y met une belle énergie. La présence de De Niro est aussi une bonne idée et un clin d’œil de plus à Taxi Driver (ironique pour le coup, avec son personnage qui serait passé de l’autre côté de la barrière pour devenir le bourgeois incarnation du système).
Le principal défaut de ce Joker c’est qu’il manque complètement de mystère. Toute l’ambiguïté du film de Scorsese résidait dans la confusion qu’on ressentait entre la folie de Travis Bickle avec celle de société où il évoluait. Rien de tout cela ici, puisque le personnage du Joker nous est présenté d’emblée de jeu comme malade, aliéné et même souffrant d’un désordre neurologique (dixit lui-même) ! Pour bien souligner qu’on a affaire à un cas social, on nous le montre vivant dans un taudis avec sa mère (foldingue), prenant ses médicaments, viré de son (merdique) travail et même suivi par une assistante sociale ! C’est glauque, démonstratif au possible, mais surtout -et c’est un comble quand on s’appelle Joker- très premier degré.
Par la suite le personnage ne bascule pas vraiment dans la folie puisqu’il y est déjà, mais plutôt dans la violence. Evidemment tout le monde s’y attend et oui rassurez-vous c’est bien explicite et gore pour justifier l’interdiction du film au moins de 12 ans. Mais encore une fois ce n’est pas tant l’extrême violence qui est choquante que le fait qu’elle soit montrée de manière aussi lourdingue, crue et sans finesse. Quant à tous ceux qui ont cru voir un message politique (anarchiste, anticapitaliste ou je ne sais quoi encore) dans les actions du personnage je dirais juste que ça n’en fait pas un bon film pour autant.
Bref pour conclure et résumer d'une même traite, on pourrait dire que ce Joker s'est vraiment donné les moyens, (financiers, humains, promotionnels), de son probable succés commercial, mais il lui manque simplement une âme. Pauvre clown triste.
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