"Joueurs" : Un polar noir stylisé et réussi

La critique complète du film : http://cinecinephile.com/joueurs-realise-par-marie-monge-sortie-de-seance-cinema/


[...] Marie Monge fait partie de ces cinéastes qui débarquent sur le devant de la scène avec une certaine ambition : celle de proposer une œuvre soignée sur tous les tableaux, autant dans l’écriture que dans l’esthétique. Joueurs raconte la romance de Abel (Tahar Rahim) et Ella (Stacy Martin). Jeune serveuse le jour, Ella rencontre Abel lorsqu’elle l’embauche pour un essai dans le restaurant de son père. Une fois la nuit tombée, Abel emmène Ella dans un Paris nocturne dont la dimension semble presque parallèle et invisible le jour. Un Paris que Marie Monge voulait filmer comme cela avait été rarement fait. Un Paris qui se passe dans les boulevards de la ville, dans les casinos souterrains où tout le monde vient jouer pour s’amuser, pour l’amour du jeu, parfois jusqu’à jouer leurs vies au point que cela devienne dangereux. Un Paris nocturne électrisant aux allures de polar noir à la Michael Mann. L’une des grandes qualités, si ce n’est la meilleure du film, c’est l’esthétique qu’insuffle la cinéaste à sa ville qui ne dort jamais. Plus particulièrement le travail sublime sur la lumière de son chef opérateur Paul Guilhaume. La cinéaste et son directeur de la photographie ont eu recours à l’usage de néons, remplacé le sodium donnant la couleur orangée aux lampadaires par du cyan afin de donner une couleur bleutée aux éclairages. Une lumière bleue nocturne qui sublime les visages de ces personnages dans la pénombre, donnant aux environnements une véritable identité visuelle qui devient un pur plaisir pour les yeux. Les intentions de son auteur font de Joueurs un pur film de genre stylisé dont l’esthétique épouse l’alchimie que filme la cinéaste entre ses deux acteurs.


La première partie du long-métrage se concentre à cultiver cette alchimie entre les deux comédiens qui font littéralement corps avec leurs personnages. Il y a quelque chose de très charnel dans cette romance qui devient un jeu, à la fois des corps mais aussi sur les tables des casinos. Plus le jeu devient dangereux, plus la romance devient sulfureuse jusqu’à la descente aux enfers du couple, où la deuxième partie marque une rupture avec la première, un revirement vers le film noir pur et dur, violent et viscéral. Un changement de registre assez brutal qui donne une dimension presque schizophrénique à ce premier film. Joueurs est à la fois une romance, un film social où les séquences de jour nous montre une dimension de Paris peu connue qui se déroule dans les cafés turcs, avant de devenir un polar stylisé sombre et violent qui n’est pas sans rappeler le cinéma américain de Michael Mann. Joueurs est donc beaucoup de choses à la fois : deux premiers films en un, un reproche récurrent aux premiers films.


[...] Si Joueurs souffre par moment de ses ambitions de premier film, Marie Monge voulant à la fois faire une romance, un film social et un polar noir stylisé, il n’en reste pas moins un premier film réussi, nous invitant à suivre de près la filmographie de sa cinéaste.

GalDelachapelle
6
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le 19 juil. 2018

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