1959, premier court métrage amateur notable de Peter Watkins, Le Journal d'un Soldat Inconnu met en scène un jeune soldat britannique pendant la Première Guerre mondiale, qui décrit son expérience du terrain tandis qu'il s'apprête à partir pour la bataille.
Sans pudeur, le propos est viscéral, à des kilomètres des propagandes patriotiques glorifiantes. Le cinéaste veut se distancer des productions hollywoodiennes qui ne laissent pas de place aux pensées et aux sentiments des individus. Tout au plus, la marque de ces productions est présente dans la musique ici désynchronisée, soulignant l'aspect propagandiste, qui rentre en contradiction avec l'absurdité, l'anxiété, et la peur, exprimées par le soldat témoin.
Dans la forme aussi, du coup, Watkins utilise beaucoup de gros plans sur le protagoniste qui raconte son expérience de la guerre (en voix off), avec peu d'espace au dessus de lui pour que l'on puisse se concentrer pleinement sur son regard, son vécu. Ce qu'il voit nous est également rendu par des plans rapprochés, soit sur la masse de soldats s'engouffrant dans la bataille (seuls 15 figurants pour représenter la scène), soit sur leurs pieds et leurs mains s'aplatissant sur la boue environnante. Le résultat est très immersif, très intense pour l'époque.
D'ailleurs, Peter Watkins a obtenu un Oscar pour ce film, dans le classement des dix meilleurs films amateur.
Au final, l'espace que le film donne à son protagoniste, dont le propos est à même de susciter des engagements pacifistes, n'en laisse pas pour les autres personnages dont les pensées restent énigmatiques. La subjectivité du soldat inconnu interroge cet environnement mais le laisse silencieux. On est donc loin, encore, du travail effectué par Watkins plus tard. Pour autant, le court-métrage est précurseur du style watkinsien, en ramenant l'attention sur l'humain et son expérience.
Je mets 3 étoiles pour la réalisation, 2 pour le montage, 1 pour les débuts prometteurs.