Contrairement à ce que l'affiche pourrait faire penser, Joint Security Area n'est pas un film de guerre, mais une œuvre politique avant tout. Cinquante ans après la guerre de Corée, alors que Sud et Nord se toisent de part et d'autre de leur frontière, le cinéaste Park Chan-wook réalise une œuvre humaniste, basée sur un constat paraissant évident, le type d'en face n'est pas un monstre comme on me le répète mais un homme semblable à moi.


Lorsque deux soldats de l'armée nord-coréenne sont tués dans leur poste de garde au niveau de la zone commune de sécurité, une enquête est ouverte. Le soldat sud-coréen qui les a abattu, le sergent Lee Soo-hyeok, est interrogé par le major Sophie Jean, suissesse d'origine coréenne chargée de l'enquête. Faisant fi des gesticulations des deux camps autour de cet incident, le major découvre rapidement que Lee Soo-hyeok n'a pas été enlevé par les deux soldats qu'il aurait ensuite abattus en s'échappant comme il le prétend. La vérité est en effet bien différente...


Cette formidable histoire de fraternisation n'est pas sans rappeler le Joyeux Noël de Christian Carion où soldats français et allemands convenaient d'une trêve lors de la première guerre mondiale. Joint Security Area, premier film n'opposant pas catégoriquement les deux Corée a été réalisé pendant une période de détente entre les deux pays. Le cinéma montre ici qu'il n'est pas seulement du simple divertissement, mais aussi un outil de communication exceptionnel, pouvant potentiellement toucher des millions de personnes à travers le monde.


Park Chan-wook met en scène une habile construction scénaristique, fonctionnant par strates qui lèvent un peu plus le voile sur ce qui s'est réellement passé dans ce poste de garde nord-coréen. Chaque strate correspond au récit de l'un des protagonistes de cet incident. Une scène qui va donc évoluer au fil du récit pour terminer sur une vérité tout autre que celle de la première scène du film correspondant à la version officielle.


Et puis il y a cette émouvante photo, prise par un touriste et dévoilée à la fin du film. Un instantané d'une amitié inavouable. Car ce que l'on retient de Joint Security Area, ce n'est pas le contexte politico-social, mais cette belle amitié entre des hommes. Ce ne sont pas les fusillades et les aboiements de petits chefs que l'on retient, mais ces éclats de rire la nuit dans un poste nord-coréen. Ce ne sont pas non plus les parades militaires le long de cette frontière tirée au cordeau dont il est bon de se souvenir, mais ce jeune soldat au visage candide qui, rongé par les remords, se défenestre.


Joint Security Area, sorti quelques années avant le magistral Old Boy, est une œuvre touchante et intimiste, admirablement servie par un quatuor d'acteurs masculins dont deux futures stars du cinéma coréen, Song Kang-ho et Lee Byung-hun. Un incontournable du cinéma

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le 4 mars 2018

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Vincent-Ruozzi

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