Julian
Julian

Court-métrage de Matthew Moore (2011)

L’innocent, l’emmerdeur et la discrète

Difficile de se concentrer sur un nouveau sujet alors qu’on vient d’en voir défiler 6 en moins de 2 heures. Le réalisateur australien Matthew Moore s’en sort haut la main en surprenant d’emblée, en captivant son public et en parvenant finalement à le faire rire de bon cœur. Conclusion bienvenue (13 minutes) du programme de courts métrages de la tournée 2013 « Les nuits en or » présentée par l’Académie des César.

Julian est un élève d’environ 9 ans qui assiste à un cours donné par un enseignant très sérieux qui propose un travail de rédaction inspiré de la lecture du « Petit prince » de Saint-Exupéry. Tellement pris par les consignes détaillées qu’il inscrit à la craie au tableau, Mr. Braybon (Leon Ford) néglige complètement les petits désordres qui se produisent dans son dos. Mais il ne les ignore pas. En effet, quand Julian lève le doigt pour signaler que le petit Geoff fait des misères à sa voisine Cassandra, Mr. Braybon écoute. Pris par son rôle d’enseignant et soucieux de faire avancer le travail du groupe, il considère que ce que Julian signale est du domaine de la broutille. A tel point que, lorsque Julian insiste, Mr. Braybon finit par l’envoyer dans le bureau du Principal.

Sur le chemin de ce bureau, Julian croise un autre élève qui vient d’être renvoyé de cours. Un habitué de ce genre de situation qui n’a aucune appréhension et entre le premier (sans frapper). Ce faisant, le garçon fait une découverte qu’il communique à Julian en sortant. Au tour de Julian de s’expliquer…

Remarquable d’intelligence, ce film montre avec beaucoup d’humour les dysfonctionnements scolaires. Si le film amuse tant c’est qu’il joue avec l’image bien connue du cafteur. On s’amuse également de voir que, malgré leur jeune âge, les protagonistes ont déjà un rôle dans cette mini-société qu’est la classe. Si Julian n’était pas si jeune, on dirait que la chute marque son entrée dans l’âge adulte.

J’ai trouvé que le réalisateur insiste trop lourdement sur ce qui se passe autour de monsieur le Principal, l’information obtenue par les garçons suffisait largement. Aujourd’hui, on reprocherait à l’enseignant de commettre une faute de débutant en renvoyant Julian sans le faire accompagner. Mais l’action est située au début des années 80, ce que l’ambiance générale et les décors rendent bien. Même observation par rapport à l’attitude confiante de Mr. Braybon vis-à-vis de ce qui se passe dans son dos. Car le petit Geoff est un vrai poison qui ne fait pas que tester ce qu’il peut se permettre. Ses petits sourires montrent bien qu’il sait parfaitement ce qu’il fait et qu’il pense pouvoir agir en toute impunité. Enfin, si quelqu’un a usé ses fonds de culotte sur les sièges d’une école australienne, j’aimerais bien savoir s’il existe(ait) effectivement des haut-parleurs dans les classes, permettant au Principal de s’adresser directement aux occupants d’une salle. Ca fait vraiment camp de concentration, ce que tout le reste contredit : décors, ambiance studieuse, attitude de Mr.Braybon.

Sinon, le film bénéficie d’un scénario bien élaboré qui fait monter la mayonnaise crescendo. Il est aisé de s’identifier à l’un des protagonistes selon ses souvenirs d’école, puisque la sérieuse et appliquée Cassandra est installée entre Julian qui voudrait l’aider et Geoff le provocateur. Julian est l’incarnation même de la bonne volonté, celui qui ose signaler un désordre (réel), celui qui ne comprend pas pourquoi la vérité n’est pas entendue. Et puis, Geoff est celui qui a compris que la belle institution a beau fonctionner de manière satisfaisante, elle comporte des points faibles qu’il se fait un malin plaisir d’exploiter à sa façon.
Electron
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le 4 juin 2013

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