La nature n'a pas besoin de nous

Un son et une vibration sur une verre d’eau, une poignée de porte qui s’abaisse silencieusement — revoir Jurassic Park plus de 20 ans après sa sortie et toujours avoir un grand plaisir à la regarder !
Bien qu’assez typique des films d’aventures de Spielberg des années 80/90, c’est à dire du spectacle positif, bon-enfant, le film reste toujours actuel sur sa thématique, soit l’Homme qui tente de façonner la nature à son envie, ici les dinosaures. Alors oui, il en faut pas non plus survrendre le film, au risque d’être déçu. Il a sans aucun doute gagné quelques galons supplémentaires par comparaison à la surenchère et les excès des derniers remakes. Mais ceux-ci nous démontrent à quel point l’original est bien équilibré, que ce soit au niveau de la tension, de la narration, et du scénario en lui-même.

Jurassic Park fonctionne toujours aussi bien grâce à un son scénario facile à suivre, un bon rythme malgré une introduction un peu longuette et des personnages crédibles. Certains des messages du film sont toujours d’actualité, d’autres ont vieillis. Le message sur la famille via le couple de scientifiques est lourd — comme par hasard c’est le réticent qui se retrouve à charge des deux enfants. Jeff Goldburn est également un peu désuet aujourd’hui, entre humour et ridicule. Mais en dehors de ça Spielberg expose sans en faire trop, les enjeux mercantiles et eugénistes du parc, et la réponse de la nature, qui « trouve toujours un chemin ». Et à partir du tour foireux du parc , le spectacle commence et le rythme ne descendra plus. Le film n’a pas de plans inutiles, Spielberg est un vrai maître du grand spectacle.

Les scènes les plus iconiques de Jurassic Park — le T-rex et la voiture de nuit, les raptors dans la cuisine — sont inventives visuellement et maîtrise parfaitement tension et détente, et soutenues par un usage des animatroniques qui n’a pas vieilli. Le film rappelle que l’homme est au final bien peu de choses au milieu de sa « création », et les dinosaures incarnent une menace à la fois frontale et insidieuse, brutale et intelligente, bref totale. Et on s’identifie d’autant plus aux émotions des personnages, à leur peur, que ceux-ci sont crédibles. ici pas de surhomme qui dresse des raptors ou de directrice badass qui court en talons aiguille. Seul le plan final est un peu tiré par les cheveux, le T-rex étant un peu une intervention divine. Mais sinon, la force du film c’est la simplicité de ses personnages, dont chacun est utile à l’histoire.

Spielberg n’a pas fait que des grands films, mais quand il les réussit, avec ce mélange de grand spectacle et d’universalité, ceux-ci perdurent.