Comme beaucoup de personnes de ma génération, j'ai une affection toute particulière pour Jurassic Park. Un des films que j'ai le plus vu et revu depuis toute gosse, usant et usant la VHS de mes parents. Et comme un peu tous les gamins à l'époque, je voulais me lancer à fond dans la paléontologie. L'alliance parfaite entre le divertissement grand public et un discours intelligent sur la petitesse de l'homme face à Mère Nature, où le désir passe avant la raison. Parce que nous sommes devenus soi-disant l'espèce supérieure sur Terre, que nous possédons la technologie et l'intelligence, nous nous permettons de jouer à Dieu pour assouvir de bas instincts infantiles et mercantiles. Qui n'a jamais rêvé d'admirer ces êtres issus d'un âge lointain ? Ils ont eu leur chance, rappelait Ian Malcolm. Et bafouer l'éthique est, justement, un jeu d'enfant pour ceux qui ne sont aveuglés que par leur appât du gain envers et contre toute logique.
La vie trouve toujours un chemin. Jouer les simili-Prométhée ou Frankenstein modernes et les conséquences désastreuses qui s'en suivirent il y a une vingtaine d'années ne leur a pas suffi. Ces connards d'InGen ont donc bien entendu PAS retenu la leçon (une poule aux oeufs d'or pareille ça se refuse pas). Et donc, persuadés qu'ils vont pas reproduire les erreurs de leurs aînés, ils vont continuer à jouer les apprentis sorciers pour amuser la galerie et faire du fric. Des docteurs Mengele en puissance s'amusant à créer l'attraction ultime, plus grosse, plus féroce, plus "cool" pour donner quelques instants de frissons au spectateur. Sauf que...
CE FILM EST D'UNE CONNERIE ABYSSALE ET UNE TRAHISON PURE ET SIMPLE DU PROPOS DU PREMIER OPUS !!! Nan mais sérieux les gars, le fond du sujet est carrément MALSAIN (oui je pèse mes mots). Quasiment rien ne fonctionne dans ce long-métrage. Les seules choses positives que j'ai sauvé de ce visionnage ô combien laborieux sont rares : Omar Sy (l'unique personnage raisonnable du film, qui fait ce qu'il peut avec les quelques scènes qu'on lui accorde); la seule séquence émotionnelle de ce maelström de stupidité est l'agonie de l'apatosaure (en animatronique). Coïncidence ? Je ne pense pas. Et peut-être quelques mises à mort dégueulasses des visiteurs.
Le reste... Par où commencer ? Les acteurs sont mauvais (mention spéciale à Vincent d'Onofrio qui cabotine à mort et le grand frère tête à claques), l'idée la plus conne du siècle du dressage des raptors (donnez-moi le nom de l'abruti qui a proposé ÇA !) et leur utilisation à des fins militaires (plus nanar tu meurs). Que dire du sprint de Bryce Dallas pas Jessica Chastain Howard en talons aiguilles (ouais ma couille je bats le T-Rex au sprint et avec style t'as vu ?!). La musique mythique de John Williams est placée n'importe comment, le fan-service et le placement de produit sont aussi subtils qu'un apatosaure dans un magasin de porcelaine et L'ABSENCE TOTALE DE LOGIQUE DU RAPPORT INTER-ESPÈCE ?! (T-Rex et Velociraptor sont pas censés faire copain-copain pour lutter contre l'Indominus Rex, au contraire le premier becterait le second).
Bref, vous l'aurez compris, j'ai pas vraiment apprécié ce Jurassic Park cuvée 2015. Je suis pas contre le principe de divertissement populaire, même si ce n'est que pour l'immédiateté d'un bon moment cinématographique sans prise de tête. Mais cela veut-il dire sacrifier le fond (et aussi parfois la forme) ? Hormis la triste scène d'un dinosaure agonisant, je n'ai ressenti AUCUNE émotion. Autant dans les films précédents de la franchise je m'attachais à certains personnages, autant ici je veux juste qu'ils ferment leur gueule et qu'ils se fassent bouffer tous crûs. J'aurais préféré un juste milieu entre l'usage avec parcimonie et bien fait du numérique et plus d'éléments animatroniques. La réalisation de Colin Trevorrow est purement fonctionnelle et n'est qu'une pâle resucée du premier chapitre de la saga, tout en le vidant de sa substance. Ce film n'apporte rien de frais et de sensé, il ne fait que matraquer l'idée que la nature est domestiquable. Il dénonce les dérives d'un système où le spectateur est de plus en plus blasé par les divertissements qu'on lui propose. Or il s'avère rapidement hypocrite, n'offrant aucune alternative aux blockbusters calibrés et les rejoins finalement dans la vacuité de leur démarche.
Bon je m'en vais me calmer et me refaire le premier Jurassic Park. En attendant le visionnage de Terminator Genisys et là, ça va chier !