Puisque la plateforme Netflix poursuit sa politique de développement d’un cinéma de genre « international » en finançant les films de jeunes réalisateurs à travers le monde, et puisque la perspective d’un effondrement, ou du moins d’un déclin, de notre civilisation est devenue d’actualité avec la pandémie du Covid19, il est difficile de ne pas être intéressés par le premier « film Netflix » venu de nos chers cousins québécois !
"Jusqu’au Déclin" ("The Decline", en langage « global ») est le premier long-métrage de Patrice Laliberté, et s’apparente a priori au genre - assez codifié - dit « survival », dont il respectera les règles : nature hostile et adversaires humains encore plus dangereux, élimination progressive des protagonistes dans un ordre « logique » - même si l’on appréciera énormément une transgression pas si fréquente que ça de l’un des principes de base du cinéma hollywoodien (pas de spoiler ici !) -, jusqu’à un affrontement final spectaculaire. Comme la nature québécoise est très belle, d’une sauvagerie qui garantit facilement les rebondissements attendus, et comme le choix, très louable, de Laliberté a été de simplifier au maximum son histoire, de la rendre le plus réaliste possible en évitant l’habituelle escalade du cinéma d’action, et de mettre sa mise en scène au service d’une parfaite lisibilité des situations, sans s’appesantir outre mesure sur leurs aspects psychologiques éventuels, les une heure et demie de "Jusqu’au Déclin" passent vite…
Le problème est que, malgré ses quelques idées originales, et une interprétation tout-à-fait correcte, en particulier de Réal Bossé qui ne manque pas de subtilité dans un rôle qui se prêtait à la simplification dénonciatrice, "Jusqu’au Déclin" ne restera guère dans nos mémoires. Au point qu’on se demande si le propos initial du film, cette paranoïa croissante des survivalistes et la manière dont elle se combine avec les aspects les plus noirs de l’humanité (égoïsme, haine des autres, refus de la différence et rejet de points de vue opposés, goût pour la violence, etc.) n’aurait pas fait un bien meilleur sujet : la première moitié du film, qui prend son temps pour nous décrire ce monde-là, est finalement la plus passionnante…
… Mais Netflix n’aurait sans doute pas été intéressé par un tel film !
[Critique écrite en 2020]
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