Certains spectateurs diront qu’il ne se passe RIEN dans ce film.
Ils seront alors passés à côté d’une finesse que rares réalisateurs savent broder. Parce que les Xavier Dolan et les Terrence Malick ne courent pas les rues, les quidams ne savent que trop peu comment les aborder.
Ces gens-là auront donc survolé le film, ils n’y auront vu que de simples scènes de vie imagées par de beaux acteurs. Ils seront restés en surface de l’histoire, qui est belle et bien plus profonde qu’un simple « dimanche » en famille.
Hors lorsque l’on regarde un Dolan, il faut savoir plonger dans l’essence du film. Comprendre les sous-entendus, les non-dits. Attrapez les messages si forts qu’il nous offre.
Les plans serrés dont il est le maître incontesté nous rapprochent au plus près des émotions, elles en deviennent palpables et nous permettent de ressentir intensément ce qu’il se passe, comme si c’était finalement nous le personnage principal.
Comment peut-on passer par de profonds moments de gêne, puis de peur, mais aussi de forte tristesse sans parler des rires ?
C’est là toute la magie et l’art que maîtrise ce jeune Québecois de 27 ans, la qualité des plans, la puissance de cette lumière qui viendra sublimer la scène finale, le choix des musiques actionnées toujours avec un timing explosif. Musiques qui d'ailleurs font parties intégrantes des scènes au lieu d'en être les bandes son.
« Il n’est pas toujours facile de partager ses émotions avec les autres, la violence sort parfois comme un cri ».
Ces mots prononcés par le réalisateur durant la remise du Grand prix du festival de Cannes 2016 résume parfaitement ce que ressent son narrateur joué ici par un excellent Gaspard Ulliel.
On lui reproche tout, lui ne répond rien.
Il est entouré d’une famille qui l’interrompe sans cesse, peut-être ont-ils peur d’entendre ce qu’il a à leur dire.
Nous subissons ainsi les engueulades incessantes et bruyantes pour tout d’un coup plonger dans des plans au ralenti, des images floutées, des voix étouffées, des instants qui laissent la scène en suspend. Catherine devient ainsi la seule qui l’entend, elle incarne la sensibilité et entre par défaut dans la confidence.
Les acteurs jouent avec une justesse touchante, chacun possédant un caractère qui nous insupporte. Le point commun qu’ils ont tous est qu’ils sont profondément humains.
Et là se trouve l’histoire de ce film, un huit clos familial qui nous rappel que peu importe ce que l’on fait dans la vie, on le fait pour être aimé.
Xavier Dolan dit vouloir faire des films qui lui ressemblent, et bien j’espère de tout cœur qu’il continuera sur sa lancée.