Adaptation d'une pièce de théâtre en grande partie autobiographique de Jean-Luc Lagarce, Juste la Fin du Monde nous fait suivre le retour de Louis dans sa famille après 12 ans d'absence. N'en espérez pas forcément beaucoup plus au niveau de l'intrigue car quasiment tout est dit dans la phrase précédente. Comme souvent chez Xavier Dolan, la véritable puissance du film vient de son étude psychologique et de son talent dans l'étude des caractères. Pourtant, pour la première fois de sa carrière, le génie québécois n'a pas fait l’unanimité.
Si ce n'est le fait de passer juste après Mommy, qui restera certainement l’un des plus grands films de ces 10 dernières années, j'ai du mal à comprendre ce rejet de certains. L'on retrouve tout ce qui fait la puissance du cinéma de Dolan dans Juste La Fin du Monde. Cela passe par la valorisation de chansons improbables (dont ici une scène bouleversante sur du ... O-Zone) ou une mise en scène adaptée au sujet (le film n'est ici quasiment composé que de plans serrés sur les visages). Mais ce qui fait la puissance réelle de Dolan, et la raison pour laquelle je l'admire, c'est sa maturité émotionnelle ! À seulement 27 ans, le jeune homme semble avoir déjà tout compris de l'âme humaine ! Je ne sais pas si c'est dû à son passif ou s'il s'agit juste d'un être d'exception à l'intelligence émotionnelle hors du commun mais avoir, à son âge, un palmarès comportant Lawrence Anyway, Tom à la Ferme, Comment j'ai Tué ma Mère et bien sur Mommy, reste une des plus belles énigmes du cinéma moderne. Malgré cette incroyable filmographie, il signe ici, pour moi, un de ses métrages les plus puissants.
Bien que l'histoire tienne sur un timbre-poste, Juste la Fin du Monde est une encyclopédie des émotions humaines. Centré sur les confrontations de cinq membres d'une même famille (Louis, sa mère, sa sœur, son frère et la femme de ce dernier), chaque protagoniste est d'une subtilité d'écriture incroyable. Rarement des personnages de fiction auront atteint un tel degré d'authenticité. En cela, le casting, ainsi que la direction d'acteur, resteront certainement comme les plus impressionnants de l'année. Si les performances de Vincent Cassel et Nathalie Baye sont plus attendues (quoique absolument parfaites dans les deux cas), ce sont surtout Marion Cotillard, Léa Seydoux et Gaspard Ulliel qui m'ont bluffé ! Il s’agit certainement de trois des acteurs français que j'aime le moins, mais je pense qu'ils livrent ici leurs meilleures prestations. Principalement Ulliel, que j'ai trouvé incroyable du début à la fin. Rempli d’ambiguïtés, son interprétation fait de Louis un personnage fascinant.
Tourné quasiment comme un thriller, Juste la Fin du Monde arrive à créer une tension palpable. Le film est exactement comme cette famille, sur un fil, entre amour et haine. Un amour qui procure de grands moments d'émotions et une haine à l'origine de scènes réellement angoissantes. À cet égard, la fin du film en est une parfaite synthèse. L'on passe d'un réel bonheur, à un sentiment de malaise en quelques secondes pour revenir sans nous en apercevoir sur une véritable tristesse. Tout comme l'être humain, avec ses forces et ses faiblesses, Juste la Fin du Monde est un roller coaster émotionnel. Même si je ne le conseillerais pas à tout un chacun tant il est classifié cinéma d'auteur, force est de reconnaître qu'à titre personnel, Dolan m'a de nouveau conquis !
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