Deux ans après son bouleversant et inoubliable Mommy et son Prix du Jury à Cannes qui avait valeur de Palme d'Or, Xavier Dolan revient avec l'adaptation d'une pièce de Jean-Luc Lagarce. Et dès la scène d’ouverture, la patte de Dolan est perceptible. Ce film sera une chorégraphie minutieusement travaillée certes, mais qui ne parviendra malheureusement jamais à avoir la fraîcheur et l'âme de son prédécesseur.
Si dans Mommy tout était dit, crié, vociféré, ici le plus important se joue dans un clin d’œil, un doigt posé sur des lèvres, une main sur une vitre, un regard, une étreinte, un silence... Entre amour et rancœurs, entre brutalité et délicatesse, Dolan rythme son histoire par les non-dits. Ce film pèse ses mots, n'en dit jamais trop et c'est sans doute comme ça que les relations humaines sont les plus belles.
Nathalie Baye est lumineuse, Vincent Cassel est détestablement juste et Marion Cotillard surprend par une justesse et une retenue qu'on ne lui connaissait plus. Tous tutoient la perfection dans ce huis clos familial épuisant, asphyxiant même.
Mais cette tirade sur les dimanches en famille n'a pas le sel de l'accent d'Anne Dorval, ces moments d'insouciance rappelés ne valent pas le rêve fragile de cette mère dévouée, et cette musique ringarde ne remplacera jamais ce karaoké d'une puissance inégalée. Si Xavier Dolan a réussi l'exploit de me faire pleurer sur du Céline Dion, il ne me fera pas pleurer sur du O-Zone, aussi belle la scène soit elle.
On pardonne tout à Dolan, même d'en faire parfois un peu trop, quitte à se caricaturer, mais n'est-on pas toujours plus exigeant envers ceux que l'on aime ? Ce film reste un excellent film, avec quelques défauts, mais après tout... c'est pas la fin du monde.