Tiré de faits réels - ici romancés - qui ont émaillés la longue carrière du K-19, le film relate la vie à bord du premier sous-marin soviétique lanceur d'engins nucléaires en immersion. Ayant pris du retard - par rapport aux américains - sur le développement de cette arme de dissuasion massive, Moscou met la pression pour que le submersible prenne la mer au plus vite et démontre ses capacités opérationnelles aux yeux de l'Occident. Du fait de cette précipitation, le K-19 fera de nombreuses victimes, tant sur le chantier naval lors de sa construction qu'au sein des équipages qui serviront à son bord. Mal né, mal conçu, le bâtiment est perclus de "bugs" comme on dirait aujourd'hui, qui ne seront jamais totalement résolus jusqu'en 1990 année de son retrait de service. C'est là le lot commun des machines de haute technologie qui essuient les plâtres des avancées techniques et servent plus de prototypes que d'unités de série. L'arrivée du réacteur nucléaire dans une coque allongée d'un design issu de la seconde guerre mondiale ne pouvait qu'accoucher d'un vilain petit canard, et ce sera bien le cas. La liste des incidents impliquant ce navire est éloquente.


Le film se base sur l'accident le plus "spectaculaire" de sa carrière, lors du déploiement de juin 1961. A cause de plusieurs erreurs de conception et de défauts de fabrication, le circuit primaire du réacteur subit une avarie et la température se met à monter vertigineusement avec le risque de provoquer une explosion nucléaire. Potentiellement démultipliée par les têtes présentes dans les deux missiles restant... C'est la proposition : un huis-clos crasseux et couillu dans lequel s'affrontent des hommes courageux mais n'ayant pas les mêmes "priorités". Certains veulent sauver leur peau, d'autre veulent sauver le navire, d'autres encore veulent sauver une idéologie, un pays, la Rodina et ses secrets. Dit comme ça, il y a tout ce qu'il faut pour faire un bon film. Hélas, c'est tourné par une américaine qui n'est pas Kubrick niveau réalisation ; et la narration est biaisée par le jugement permanent d'une soi-disant supériorité occidentale sur le monde soviétique.

Je ne vais pas m'étendre sur le film en lui-même que je trouve plutôt mauvais. Sa construction est très ratée dans son premier tiers où se succèdent des scènes sans aucune logique. On passe ainsi de types luttant contre un incendie fictif et qui le plan d'après sont tous tranquilles en train de mater un film dans le compartiment des torpilles. On a même le droit à une scène ubuesque où le commandant sait combien de blessés il y a alors que personne n'est venu lui donner l'information...

Heureusement, le deuxième tiers se montre plus subtil et humain, avec l'affrontement entre les 2 superstars Ford et Neeson, les deux commandants du bâtiment face à leurs hommes qui aimeraient bien que leur homme démette le grand chef obtu afin de sauver tout le monde. Et celà, alors qu'il faut envoyer des volontaires (ou désignés comme) colmater la brèche au coeur du réacteur, signant leur mort certaine.

Le dernier tiers rachète cette oeuvre plutôt brouillonne et cousue de fils blancs, même si elle peut paraître surprenante mais je n'en dis pas plus pour ne pas spoiler.

Dans le genre très restreint des films de sous-marins, K-19 se place dans la moyenne, très loin derrière Octobre Rouge, USS Alabama, Le chant du loup, et j'oserai même encore plus loin que Des hommes d'honneurs. Qui n'est pas un film de sous-marin.

K-19 n'est pas génial mais ça se regarde en pensant à toute l'ironie de la chose : ce bâtiment de guerre qui était sensé tuer les ennemis de la mère patrie, aura finalement fait plus de victimes dans les rangs des défenseurs fidèles et zélotes de Mère Patrie. C'est le parti prix de ce film, mais vu qu'il a servi jusqu'en 1990, en étant maintes fois requalifié... Ce bâtiment de guerre a aussi beaucoup aidé la Russie à développer son arme sous-marine. Et ça, le film ne le dit pas évidemment.


PS: je note que le vin (rouge) soigne contre les radiations. C'est la seule chose positive que je retire de ce film.

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il y a 8 jours

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Ivan Duraive

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