Lancelot, merci d'être passé

Mais comment Astier a pu merder comme ça ?

A l'idée du film j'étais perplexe, mais je me disais pourquoi pas, finalement ça peut donner une dimension plus épique à l'histoire. Et les deux dernières saisons étaient vraiment géniales en prenant leur part de la tragédie de la légende arthurienne. Mais quand je vois le résultat, je me demande vraiment qu'est-ce qu'il est passé par la tête d'Alexandre Astier pour faire tous ces choix et embourber son film et donc son histoire dans ce marais d'ennui.

Une dizaine d'année après la fin de la série qui avait offert beaucoup en terme d'humour et de dramaturgie, le film nous propose de ne rien raconter, de ne pas faire rire et d'éjecter la dramaturgie. Si Astier ne voulait pas faire cette suite au cinéma, fallait le dire, on aurait râlé, mais on aurait fait notre deuil...

Je vais commencer par les bons points : la musique, certains visuels et ... j'ai fait le tour.

Le film est une déception à tous les niveaux.

L'histoire n'avance pas et ne propose rien. Arthur que l'on avait quitté à Rome est devenu esclave en Afrique du nord, et entre les deux : rien. Ca fait dix ans que le mec est esclave à jouer les forçats. Mais quand on le retrouve notre bon Arthur est frais comme un gardon et nage comme un dauphin, il faut croire que l'esclavage antique dans les carrières est bon pour la santé. A peine quelques rides en plus. Bon, pourquoi pas, le mec veut se faire oublier du monde, donc il accepte une condition misérable pour retrouver un semblant de paix intérieur. Ok, je veux bien faire l'effort d'y croire. Mais pendant ce temps, en Bretagne, Lancelot tyrannise tout le monde (si, si, je vous le jure, tout le monde le dit), mais ne prend aucune décision, ne fait rien, ne donne aucun ordre qui pourrait paraitre cruel, il n'est obsédé que par une chose retrouver Arthur et les anciens chevaliers (et là pareil, tout le monde le dit, mais quand on voit Lancelot on dirait qu'il s'en fout un peu). Il n'a rien d'un tyran, juste un emo trop dark et qui ne dit jamais rien, parce que c'est trop dark (de tout façon quand il parle c'est pour dire des conneries ou jouer les amoureux pitoyable) avec un cosplay de dinosaure, on sait rien de ce qu'est la nature exacte de sa tyrannie (on voit juste que les paysans sont surtaxés...) et la quête du Graal : il la oublié. Et les autres personnages ? Résumons : personne n'a évolué d'un iota,. On pourrait être 5 minutes après la fin de la série que ce serait pareil. Sauf que problème, si je veux revoir exactement les mêmes personnages de la série, bah je regarde la série, là je m'attends à les voir changer, affermis ou affaiblis par des années de pouvoir autoritaire. Espoir déçu. En même temps, ils ne servent à rien, l'histoire avance par la grâce du scénario, tout seul, sans justification.

Donc un saut de dix ans qui ne sert à rien, mais admettons. Seulement, le film n'avance pas plus, spoiler de dingue : Arthur récupère Excalibur, redevient roi et Lancelot dégage dans son vieux château trop dark et il murmure "je reviendrais (encore)". Dis comme ça, on pourrait croire qu'il y a des péripéties pour en arriver jusque-là. Oui, faut bien combler les deux heures de film, du coup on a des séries de rencontres et de séquences, qui donne l'impression que le film fait pause entre deux séquences, raconte une blague nulle pendant cette pause, fait vaguement avancer le récit, pius séquence suivante, etc...

Le film est très rarement drôle (j'ai ri une fois à une blague de Perceval sur les squats et le jus de fruit) et ressemble à un pot pourri youtube des meilleures (enfin, les meilleures...) répliques de la série. On a le roi Burgonde qui nous balance du "Salsifis" en moyenne un mot sur trois.

L'aventure, vous oubliez. Il y a parfois des jolis plans sur des décors pas mal, faut avouer, mais on ne profite de rien : faut se dépêcher de faire des blagues nulles. Et cette nullité dans l'humour n'est pas du tout compensée par un ton plus dramatique, non, non, non... le film se prend pour une vraie comédie avec quelques nuages dark, une Excalibur dark et un Lancelot dark à sable. Les questions qui hantaient les personnages de la séries, que l'on suivait comme un fil rouge, sont partis en orbite avec Lancelot, là nous avons juste Arthur qui ne veut plus être roi (exactement comme avant) et que finalement il veut bien être roi (euh... pourquoi ?), mais n'est pas certain d'en être digne, mais que finalement, avant un combat danteste avec Lancelot il en est digne... mais qu'il veut quand même mourir (sans doute parce qu'il se rend compte que son château moche en numérique a détruit à jamais l'imaginaire des spectateurs)... mais finalement ça dure trente secondes et il veut bien reprendre sa place...

C'est dur... pendant la séance ça passait, mais plus je revois le film dans ma tête plus je souffre. Où sont passés la complexité, la subtilité, les émotions, les ruptures de tons, l'humour.

La série nous faisait sentir toute la vie du royaume de Logres, le film a tout désintégré pour nous montrer que ce monde est factice.

Par pitié Alexandre, fait un vrai film pour la suite.