Kidnapping Mr. Heineken par pierrick_D_

Amsterdam,début des années 80.Cinq amis inséparables ont fondé une entreprise de bâtiment mais,la crise économique arrivant,leur société a fait faillite.Ruinés,ils décident de se refaire en kidnappant le patron de la célèbre brasserie Heineken.Ce film anglo-néerlandais,inspiré d'une affaire bien réelle,est adapté du livre de Peter de Vries consacré à ce fait-divers et réalisé par le suédois Daniel Alfredson,le premier à avoir porté à l'écran le "Millenium" de Stieg Larson.L'oeuvre est intéressante à plus d'un titre.Déjà,elle nous plonge dans un décor finalement peu utilisé au cinéma,celui d'Amsterdam,la Venise du Nord,avec ses canaux et ses maisons de brique rouge.On retrouve aussi l'ambiance des années 80,si différente et si proche de celle d'aujourd'hui.Les scènes de poursuite à travers la ville sont ainsi étonnantes,avec ces voitures fonçant sur les quais.Essayez un peu de faire du rodéo urbain là-bas de nos jours,dans cette cité complètement obstruée par les vélos,les piétons et les troupeaux de touristes,essayez même de seulement vous y garer.Surprenant aussi le fait que n'importe qui puisse connaître l'adresse d'un magnat des affaires et que celui-ci ne soit pas protégé par le moindre garde du corps.Autres temps,autres moeurs.Sur le fond,c'est également passionnant car on voit bien l'essor conjoint du tout-capitalisme et du sociétalisme à l'occidentale.Bizarrement,les malfaiteurs sont ici sympathiques,beaucoup plus que leur victime d'ailleurs.Les eighties,c'était la foire au pognon,l'explosion des bulles spéculatives,le moment où tout le monde voulait réussir,c'est-à-dire gagner plein de fric,en montant sa propre boîte.Et c'est ce que ces gars ont fait,ils ont cru au mirage de la fortune et du capitalisme triomphant.Ces types étaient intelligents,honnêtes et travailleurs,pas forcément les qualités requises pour durer dans un milieu des affaires où les gros poissons bouffent les petits.Du coup,ils se sont fait baiser et se sont retrouvés dans la mouise.Endettés,lâchés par les banques,ils ne peuvent même pas récupérer leur dernier bien,un immeuble squatté par des drogués.Et quand ils tentent de déloger les intrus par la force,c'est eux qui sont arrêtés et emprisonnés,car les Pays-Bas ont toujours été à la pointe du laxisme extrême et de la promotion de la délinquance.De quoi avoir les nerfs,de toute évidence.Alors,ils ont une idée saine et logique,celle de s'attaquer à une icône de ce monde matérialiste,le richissime Freddy Heineken.Cible d'autant mieux choisie que le père d'un des ravisseurs travaillait chez Heineken,qui l'a viré sans ménagement,ce qui n'empêche pas le vieux de vénérer son ex patron.Les gars,malgré leur inexpérience,montent un coup parfait,d'une organisation et d'une précision dignes de professionnels.Mais le crime paie rarement,surtout quand on s'en prend aux très puissants,car là la police se bouge,et ça se finira mal pour le gang amateur.Certes,le scénario manque de densité et les auteurs tirent parfois à la ligne,mais Alfredson,en dépit de moyens limités,parvient à maintenir une certaine tension en tournant des plans serrés et rapides installant une ambiance d'urgence.Les jeunes comédiens figurent parmi les plus insignifiants de leur génération,et pourtant ils se montrent impeccables,faisant corps avec les anti-héros ordinaires qu'ils interprètent.Jim Sturgess est Cor,le cerveau de la bande,Sam Worthington joue Willem,la brute épaisse,tandis que Ryan Kwanten incarne l'ingénieux Cat.Moins connu mais tout aussi bon est l'acteur hollandais Mark van Eeuwen,l'incontrôlable Spikes.Et puis,il y a le vieil Anthony Hopkins,très à l'aise dans le rôle du calme et manipulateur Heineken.Il est assez frustrant de ne pas savoir comment les kidnappeurs se sont fait gauler.Sans doute ont-ils commis une erreur quelque part et quelqu'un a dû les balancer,mais la police néerlandaise n'a jamais voulu livrer la vérité à ce sujet.