A la sortie de la première partie du diptyque "Kill Bill", beaucoup ont reproché une certaine superficialité, un manque palpable d'émotion derrière le défouloir jouissif qu'offrait Tarantino. Pas complètement faux, même si les choses ne sont pas aussi simples, comme va le démontrer brillamment ce second volume.

A la frénésie cartoonesque du premier volet, Tarantino cède la place à une atmosphère moins délirante, plus posée, plus crépusculaire, d'avantage portée sur l'introspection que sur l'action. Le cinéaste au débit de mitraillette ancre définitivement son récit dans le western lyrique et désenchanté, mariage parfait entre Peckinpah et Leone, avec un soupçon de Chang Cheh.

S'il continue d'offrir quelques séquences d'action mémorables comme le duel sauvage entre Uma Thurman et une Daryl Hannah diaboliquement belle, Tarantino fait bien plus parler ses personnages que la poudre, les sentiments prenant le pas sur la castagne. C'est ainsi qu'au détour d'une poignée de dialogues superbement écrits (génial monologue sur la complexité du personnage de Superman), toute la sensibilité et la profondeur sous-jacente de "Kill Bill" nous saute au visage, nous prend enfin aux tripes. Plus qu'un simple hommage référentiel à la série B, "Kill Bill" est bel et bien un magnifique portrait de femme, le récit bouleversant d'une femme à qui l'on a tout prit, tout autant que celui d'un homme blessé et meurtri dans son amour, amant éconduit dont la vengeance sera proprement biblique.

Toujours aussi maîtrisé formellement, offrant un superbe écrin à ses comédiens (échappé des limbes, David Carradine trouve son plus beau rôle), capable de vous laisser au bord des larmes dans ses ultimes instants, ce second volet achève de faire de l'histoire imaginée par Quentin Tarantino et Uma Thurman une déclaration d'amour bien plus profonde qu'elle n'en a l'air, cachant derrière ses atours de chambara rien d'autre que la rupture tragique et sanglante de deux êtres incapables de gérer sereinement leurs sentiments.

Petit cadeau: la véritable fin de "Kill Bill": http://www.youtube.com/watch?v=Rqsyb59m38Y
Gand-Alf
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le 14 nov. 2013

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Gand-Alf

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