Poule et frite, mais 100 patates aussi.
Je revendique le droit de ne pas sucer le pilon frit de Friedkin.
Merci de votre compréhension.
Killer Joe, que tout le monde semble porter aux nus à grand renfort de notes et critiques dithyrambiques, n’est tout simplement pas le film auquel on m’avait préparé.
Oui, Friedkin fait montre d’une réalisation léchée, encore heureux à son âge de ne pas filmer comme un étudiant en cinéma de première année. Oui, Mc Conaughey peut se targuer d’en imposer avec son petit numéro de psychopathe, qui à défaut d’être crédible et inédit se révèle efficace. Oui, on retrouve les éléments d’un film noir d’aspiration crado sexy.
Mais où est le propos ?
Je vais vous dire moi, ce film c’est comme un Coen sans les frères Coen. On a les ploucs, les losers, le patelin, la violence, le coup foireux, mais aucune substance derrière.
Les personnages méritent tous autant qu’ils sont de crever de leur connerie, et à la limite c’est tout ce dont on se surprend à souhaiter le long du film, tellement les supporter s’apparente à un supplice. Juno Temple elle est bien bonne mais 5 ans de plus et des cours de minauderies lui feraient le plus grand bien. À un moment on voit la toufasse de Gina Gershon, et on a du mal à croire que tout ça soit à l’origine du monde. Hirsh a une tête à claque, et ça console presque de voir qu’il s’en prend quelques unes. Bref pas grand chose pour sauver un propos sans nuance et sans le minimum de traitement moral dont il aurait dû bénéficier.
Tout ça donne un film qui se veut subversif et se contente de construire artificiellement un malaise qui ne tire son efficacité que d’effets de mise en scène et de jeu, faute d’enjeu palpable et crédible. Car au final on en a tellement pas grand chose à s’en secouer qu’on à peine à croire que le minuteur tourne et que tout ça va finir par se conclure en étant à la hauteur de ses prétentions.
Je reconnais encore une fois que les artifices en jettent : photo superbe, cadrage et montage aux petits oignons, mise en scène soignée, musique de circonstance. Mais faudrait peut être aussi en jeter sur le papier et donner un peu plus d’importance au travail d’écriture ; chose qu’auraient fait les frères Coen en partant d’un pitch pareil.
On aurait eu droit à un plus d’humanité et d’empathie —sans rien enlever à l’acidité du propos— et de quoi réfléchir un peu plus aux circonstances d’un enfer familial causé par autre chose qu’une bande de cons sans mœurs qu’on est bien content de laisser pourrir dans leur merde après un final absurde, indigeste et indigent.