Un remake pas aussi nul qu'on veut le faire croire

On pouvait à priori craindre le pire de ce remake entrepris par le producteur Dino De Laurentiis du classique de 1933. Offrir une vision plus moderne en 1976 d'un film mythique des années 30 partait d'un bon sentiment, le premier King Kong étant une oeuvre à part enfouie dans la mémoire collective et cinéphilique, que l'idée d'en faire une nouvelle version pouvait choquer. Mais après tout, les Japonais avaient un peu ridiculisé l'image de Kong dans de gentils nanars comme King Kong contre Godzilla et autre King Kong contre Mekanik Monster... qu'il fallait aussi balayer tout ça d'un revers de main, et moi je le trouve pas si mal ce remake, malgré les critiques et les notes basses qu'il se ramasse. Je me souviens en 1976, j'étais ado, et il s'en était pris des critiques acerbes dans la face de la part des intellos, je ne comprenais pas ça car j'avais adoré ce film ; depuis, j'ai grandi et appris à voir quelques défauts qui m'ont fait reconsidérer mon opinion, mais encore une fois, je trouve l'ensemble assez réussi, et j'ai envie de défendre ce film.
Tout d'abord, au risque de surprendre ou choquer, j'ai du respect pour la version 1933, mais lui aussi n'est pas parfait, et son ton trop daté, même s'il doit être replacé dans son contexte, a tendance à ne pas m'émouvoir ; les Fx sont bien évidemment très risibles, le rôle de Ann Darrow n'est pas assez étoffé, la fille se contente de hurler à tout bout de champ que ça en devient pénible, et tout va un peu trop vite, bref j'aime bien le film, mais je n'y vois pas autant de poésie et de profondeur qu'on veut bien nous le faire croire, seulement une histoire d'amour fou impossible et surréaliste aux implications sexuelles latentes, mais pas de quoi grimper aux rideaux. Enfin, ce n'est que mon avis.
Bénéficiant d'un budget de 25 000 000 de dollars (grosse somme en 1976), ce nouveau King Kong signé John Guillermin, qui venait de réaliser la Tour infernale, était entre de bonnes mains, le réalisateur ayant le sens du grand spectacle. Parmi les critiques les plus répandues circulant à l'époque, on entendait qu'il n'y avait plus la poésie onirique de 1933... mais n'est-ce pas parce que le film avait été tourné justement dans ces années 30 et avec des effets spéciaux rudimentaires que cette version en a gardé tout ce charme ? je crois que c'est ça que le public de 1976 (et même certains spectateurs d'aujourd'hui) ont gardé en eux, une sorte de vernis propre aux films des années 30, malgré tous les défauts techniques et le côté obsolète que ça engendre, ils ont gardé une image positive de ce Kong de 33 à cause de son époque qui lui donne un cachet.
Le résultat de ce remake de 1976 est finalement une bonne surprise, les Fx sont plutôt performants, ils ont certes des défauts dans l'aspect robotique et animatronique par endroits, mais le type revêtu d'une peau de singe ne s'en sort pas si mal, le costume ayant été conçu par Rick Baker, ça donne parfois de bonnes scènes comme celles dans la cale du bateau, ou celle où Kong souffle amoureusement sur Dwan ruisselante ; il y a même une ambiguïté érotique beaucoup plus efficace que dans la version de 1933, Jessica Lange (qui trouvait là son premier rôle à l'écran) bénéficiant d'un vrai dialogue, amène même un certain humour à cette relation hors norme, et ne passe plus son temps à crier. Le réalisateur parvient à trouver un ton assez juste et parfois même troublant pour décrire la folle passion de ce gorille géant. Les indigènes ont l'air de vrais indigènes et non de Blancs maquillés avec un fond de teint. L'île du Crâne possède aussi un décor plus impressionnant, il n'y a plus de dinosaures mais quelques bestioles dangereuses, et les personnages ont changé : il n'est plus question de tournage de film mais de recherche de pétrole, de même que Jeff Bridges et Charles Grodin sont parfaits dans leurs rôles.
Au vu de tout ceci, je trouve que le film est plus que regardable et ne mérite pas tant d'injuste mépris ; ce que le producteur De Laurentiis a cherché, ce n'est pas de reproduire la poésie de la première version, mais de donner une vision plus spectaculaire, une autre image d'une relation interdite et étrange entre une jeune femme et un gorille de 30 mètres, et je crois qu'il y est amplement parvenu.

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le 12 mars 2017

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Ugly

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