The Man Who Would Be Kong
On peut dire ce qu'on veut de Peter Jackson mais son parcours de cinéaste a le mérite de ne pas ressembler à grand chose de connu. Parti du gore festif et bricolo pour s'aventurer sur des terres plus auteuristes (Heavenly Creatures, Forgotten Silver) ou la série B décomplexée (Fantômes contre Fantômes, peut-être son meilleur film), Jackson a fini par s'échouer sur les rives du blockbuster mégalo avec son adaptation discutable mais respectable du Seigneur des Anneaux.
Même si son influence sur le cinéma à gros budget (de la shaky-cam à l'étalonnage Canard WC des couleurs) est indéniable, on peut se demander si le cinéaste n'y a pas laissé quelques plumes. Il suffit de regarder Lovely Bones, improbable mélange de virtuosité et de laideur pour constater à quel point Jackson s'est peu à peu fait bouffer par ses propres travers.
Paradoxalement, cette descente aux enfers vers un art de plus en plus dégénéré constitue une des forces de ce remake de King Kong, écrin idéal pour un cinéaste qui réussit l'exploit d'être à la fois complètement pompier (cette fascination maladive pour l'hénaurmité) et délicat comme une midinette de 14 ans (le côté très pleurnichard du Seigneur des Anneaux).
À partir de ce postulat le film ose à peu près tout et n'importe quoi : une exposition interminable, des sauvages qui attaquent le bateau des héros en faisant du saut à la perche, Naomi Watts qui fait l'acrobate en pleine jungle ou le gorille qui nous refait Holiday On Ice sur l'étang gelé de Central Park. Œuvre boulimique toujours sur le point d'exploser, succession de chromos toujours sur le fil de la laideur, King-Kong-le-remake n'est sans doute pas la relecture flamboyante que Jackson cherchait à réaliser mais c'est probablement l'œuvre la plus fidèle à sa personnalité de réalisateur.