Il y a un truc que je ne comprends vraiment pas avec Shyamalan, et que je ne comprenais déjà pas avec Old, c'est sa volonté de tout « prémâcher » pour le spectateur, de ne laisser plus aucune porte ouverte une fois le film terminé, de ne plus laisser le moindre espace au doute, comme s'il réalisait des films pour des débiles. Le truc, c'est que c'est quelque chose qu'il ne faisait pas par le passé… au contraire même puisque Signes s'est en grande partie fait démonter par des personnes n'étant pas capable de comprendre que les extraterrestres du film n'étaient pas forcément belliqueux. Même Phénomènes et After Earth, pourtant vraiment loin d'être chef-d'œuvre (au cas où il serait encore nécessaire de le préciser), ne prenaient pas le spectateur pour un con à ce point.


Ici, tout ce qui a été amorcé en amont, doit être désamorcé tôt ou tard : aucune place au doute n'est permise. Par exemple, j'ai trouvé plutôt judicieux de suggérer au spectateur que c'était Redmond (Rupert Grint) qui attaquait Andrew (Ben Aldridge) lors de la scène du bar, sans pour autant révéler que c'était lui l'agresseur… sauf que voilà, seulement quelques minutes plus tard, on nous confirme que c'était bel et bien lui. Quel intérêt ? Le personnage est mort depuis un moment, la fausse-piste de l'agression homophobe n'a jamais pris. Quel est l'intérêt de confirmer au spectateur que l'un des étrangers a un passé d'homophobe du coup ? Encore pire, on devine dès la scène d'introduction, lors du dialogue entre Leonard (Dave Bautista) et Wen (Kristen Cui), que la venue des étrangers n'est en aucun cas lié à une agression homophobe.


Le pire reste tout de même les révélations concernant l'apocalypse. Le fait de renvoyer explicitement le spectateur à la Bible, et plus particulièrement aux Quatre Cavaliers de l'Apocalypse, à moins d'avoir été bercé trop près du mur, je ne vois pas comment on ne peut pas faire le rapprochement… en plus, les noms qu'ils mentionnent (la malice, le soutien, la guérison et la guidance) n'ont rien à voir avec eux. Mais le pire du pire, ça reste tout de même la fin, qui ne laisse plus aucune place au doute, déjà en nous montrant des avions se crasher en arrière-plan, puis, lors de la scène du routier à la toute fin, en nous révélant que l'intégralité des événements décrits par les étrangers se sont produits et qu'ils ont bien sauvé le monde en sacrifiant l'un d'eux.


Il n'y a aucune place au doute, à la moindre question (à peine) philosophique, comme s'il ne fallait absolument pas que le spectateur fasse fonctionner le moindre de ses neurones. Quatre étrangers débarquent chez une famille pour leur annoncer que si l'un d'eux ne se sacrifie pas, c'est la fin du monde… et voilà, c'est tout, ça ne va pas plus loin que ça, le film ne propose rien d'autre. À la limite, quitte à s'en tenir à si peu, j'aurais préféré que le long adopte le point de vue des étrangers en fait : on aurait probablement eu droit à des scènes plus intéressantes.


Reste tout de même le choix des acteurs, et surtout leur direction, l'une des rares compétences que Shyamalan n'a pas perdu avec Knock at the Cabin (avec sa volonté de faire des caméos). Tout le monde se débrouille bien, y compris Kristen Cui, une actrice de seulement huit ans, qui se révèle irréprochable (j'ai tellement été marqué par le gosse dans La mariée était en noir que le simple fait de savoir qu'il y a un enfant acteur m'effraie). Mais s'il y a en a bien un qui m'a surpris, c'est Dave Bautista. Forcément, ayant lancé le film sans n'avoir vu une seule bande-annonce, mais ayant tout de même vu l'affiche qui se montre sans équivoque quant à son ton, je m'attendais à ce qu'il se révèle être LA menace du film… et ce n'est pas du tout le cas. Le personnage qu'il interprète est doux comme un agneau, est profondément marqué par ce qu'il doit faire, et on sent qu'il se contient tout du long, qu'il fait tout afin de se montrer le moins menaçant et violent possible.


J'ai appris, tout juste après avoir vu le film dont il est question aujourd'hui, que Shyamalan avait projeté de relancer Les Contes de la crypte en 2016. Je ne sais pas où ça en est (c'est probablement mort), mais Knock at the Cabin (tout comme Old d'ailleurs) aurait gagné à être un épisode d'une série d'anthologie, ou un moyen-métrage tout au plus. En tout cas, le film aurait gagné à durer deux fois moins longtemps, ç'aurait dégagé une grosse dose de superflu.


En attendant, vu le vide que j'ai vu en face de moi, vous ne perdrez pas grand-chose à fixer un mur blanc pendant une heure trente à la place.

MacCAM

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