Synonyme d'aliénation dans la langue Hopi, "Koyaanisqatsi" aura nécessité pas moins de sept ans de tournage à travers le monde et quatre années supplémentaires de montage. Autant dire un véritable parcours du combattant pour ses créateurs.
Indéniable révolution dans le monde du documentaire, aussi fascinant qu'il peut-être rebutant (presqu'une heure et demie d'images en avance rapide, le tout sans dialogues, on peut ne pas aimer), le film de Godfrey Reggio est avant tout une expérience sensorielle et hypnotique, hantée par les images de Ron Fricke (qui poussera le concept à son paroxysme avec son magnifique "Baraka") et par la musique envoûtante de Philip Glass, qui demandera un certain abandon de la part du spectateur.
Aussi beau qu'il est effrayant, aussi merveilleux que cauchemardesque, "Koyaanisqatsi" est une vision bien particulière de l'espèce humaine, tableau dantesque d'une humanité totalement engloutie par ce qu'elle a elle-même créée, totalement dépendante d'une industrialisation déshumanisée, parcours frénétique d'un monde marchant de plus en plus vite vers une possible implosion mais déjà prêt à conquérir (détruire ?) d'autres univers.