Kraven the Hunter use et abuse de la métaphore filée de la chasse, qu’il représente physiquement lors d’un safari ou lors des séquences d’action et verbalement par le biais de jeux de mots, pour mieux figurer la malédiction transmise par un père autoritaire et obsédé par le contrôle à ses deux fils, chacun caractérisé par le déguisement ou non de sa véritable nature : le costume trois pièce pour l’un, la fourrure animale pour l’autre. Une réplique prononcée en début de film affirme que pour devenir une légende, il convient d’en tuer une ; aussi la suite s’efforce-t-elle d’interroger cet adage en peignant le personnage interprété caricaturalement par Russel Crowe sous les traits d’un mentor dangereux.
Nous retrouvons la thématique de l’intégrité chère à J.C. Chandor, avec le symbole du miroir réfléchissant une image avec laquelle les personnages ne sont pas forcément en accord, ici déclinée dans un blockbuster dépourvu d’intérêt mais bien mené et exécuté. Le cinéaste se montre autant à l’aise lors des séquences de dialogue, révélatrices des rapports de pouvoir entre les interlocuteurs – ce qui n’est pas sans évoquer Margin Call (2011) – que pour celles impliquant une action soutenue, toujours lisible en dépit des déplacements furtifs de son chasseur principal – rappelant Triple Frontier (2019). Nous regretterons la fadeur d’ensemble, fidèle aux productions Sony/Marvel, et l’aspect cliché d’un scénario qui aurait gagné à développer les phases de mutation de son héros : une poignée de minutes pour montrer l’hybridité de cet homme-lion là où Le Règne animal (Thomas Cailley, 2023) y consacrait un long métrage entier.