Bien qu'il puisse être considéré comme une sous-catégorie du film d'action, le film d'arts martiaux ou de kung-fu possède son identité, avec ses caractéristiques. Caractéristiques qui ont pu devenir caricaturales avec le succès du genre dans les années 1970.
Mais peu de personnes se sont essayées à le parodier. Alors que le film catastrophe y a eu droit, de même que pour le film d'horreur, le film d'espionnage (Austin Powers), les films de black-exploitation, et tant d'autres genres et sous-genres moqués et détournés. A ma connaissance, seul John Landis s'y est essayé dans Hamburger film sandwich, parmi d'autres sketchs parodiant toute une gamme large du cinéma. C'était en 1977. Il doit y en avoir d'autres, mais ils se cachent, les vils peureux.
En 2002, crevant l'écran, Kung Pow vient corriger l'injustice à grands coups de taloches. Et avec quel panache ! Car le film reprend les images de Tigre indomptable, un film d'action hong-kongais de 1976 mais en incorporant de nouveaux acteurs, de nouveaux doublages, de nouveaux bruitages. De nouvelles scènes ont même été tournées aussi pour s'ajouter à joyeux foutoir parodique.
Le film rappelle la démarche de Woody Allen dans Lily la tigresse en 1966, en détournant complètement un film d’espionnage japonais. Kung-Fu Pow y ajoute les effets spéciaux du vingt-et-unième siècle.
L'histoire est d'ailleurs presque le résumé de tant de films d'arts martiaux de cette époque. L’Élu veut venger la mort de sa famille. Heureusement pour lui, il maîtrise le kung-fu depuis son plus jeune âge.
Dans la grande liste des points à parodier du cinéma de kung-fu, Kung Pow n'oublie rien, en premier lieu ses scénarios souvent indigents. Mais aussi les cascades improbables, les petits cris insupportables, les doublages en décalage, les plans de caméra à donner le vomi, les faux raccords et autres problèmes de réalisation. Et, visiblement, il y avait déjà de la matière sur Tigre indomptable.
Mais il le fait aussi en y ajoutant sa propre patte. C'est parodié avec un certain sens de l'absurde. En y incorporant des petits détails sur les images d'époque. En détournant avec merveille les dialogues par rapport à ce qui est montré. Et avec des nouvelles scènes. Hélas, le film est moins convaincant quand il ne se sert plus du film original. Certaines scènes s'éternisent, comme le tabassage à bâtons ou le combat contre la vache.
Les incrustations sur la pellicule sont assez bluffantes, comme celle du remplacement du personnage principal par Steve Oederkek. On remarque l'ajout ou la modification numérique de temps en temps mais dans l'ensemble, c'est assez bien fait. Alors que nous sommes en 2002. Mais d'autres effets spéciaux ont mal vieilli, surtout ceux en images de synthèse, comme la vache, assez embarrassante.
On pourrait aussi reprocher au film d'aller parfois trop loin dans l'absurde, surtout dans les scènes ajoutées, alors que tous ses gags parodiques fonctionnent bien mieux.
Mais c'est dans l'ensemble une assez belle réussite, que l'on doit à Steve Oedekerk. Acteur principal, producteur, réalisateur du film. Un grand monsieur de la comédie américaine, surtout connu pour Ace Ventura en Afrique, Le Docteur Foldingue, Jimmy Neutron ou Bruce tout puissant, avec des implications différentes sur ces projets. Et quelques comédies moins connues mais fort appréciées selon interweb qu'il va falloir découvrir.
Il manque une certaine constance dans l'humour pour que Kung Pow soit une grande comédie, qui ne connaît pas de demi-mesure. Il aurait parfois gagné à ne pas ajouter du contenu à l'oeuvre originale, c'est son détournement et la parodie du genre qu'il crée ainsi qui est la partie la plus réussie du film. Mais cela se joue à peu, et permet à Kung Pow de se classer dans les bonnes curiosités du cinéma comique américain.