« L’accusé », voire, encore plus pitoyable, « Invisible guest », se veulent les différentes traductions françaises de cet excellentissime Contretemps Espagnol. Un jeune businessman Catalan élu homme d’affaires de l’année est accusé du meurtre de sa maitresse dans une chambre d’hôtel. Confronté à une redoutable et célèbre avocate convoquée exceptionnellement pour lui faire gagner ce cas désespéré, ce huis-clos s’étale sur toute la durée de leur dialogue d’investigations, de confidences, de déductions et de préparations de défense, ponctué bien sûr d’une succession ininterrompue de flashbacks tant révélateurs que mystificateurs.
Dans une cascade de circonstances hitchcockiennes allant crescendo, on reste d’abord solidaires de cette relation clandestine, s’empêtrant de drames qui s’empirent à mesure qu’elle s’acharne à préserver leur pauvre secret, par l’emprise glaciale de la formidable légiste aux angoissantes intentions, puis complètement mystifiés par la mise en lumière d’un renouvèlement perpétuel des enjeux réels, et ce jusqu’à un twist final à couper le souffle. La pluie de versions, d’hypothèses, plusieurs fois revisitées, pour les besoins évolutifs de la défense autant que pour la vérité, instrumentalise une incroyable partie d’échecs, de manipulations et de machiavélisme aux intérêts à la fois communs et opposés entre deux virtuoses du mensonge et du pouvoir.
Dans la lignée d’un Usual suspects, ce film énorme se voit deux fois, la première pour le bonheur d’être bluffé, et la seconde pour jouir de la manière avec laquelle on s’est fait balader.