Casting cinq étoiles pour ce Polar montagnard des frères Larrieu. Ce duo fraternel très peu en vue dans le paysage du cinéma français s'est offert une brochette d'acteurs de luxe. Présence non négligeable tant le reste du projet n'était guère aguicheur.
Autour de Mathieu Amalric, encore fabuleusement paumé, gravitent quatre figures bien distinctes qui deviendront des archétypes de cartes Cluedo. Avec une introduction faussement contre-pied à ce qu'on attend d'un polar on croit être embarqué dans un film original qui casse les codes du genre, enfin de compte il ne fait que le retourner.
Le crime qui ouvre le film n'en est absolument pas le sujet principal et encore moins celui du titre. Vulgairement justifié par un somnambulisme et vite réduit à l'anecdote. L'idée de suivre une affaire policière à travers les yeux du criminel n'est pas très originale certes, mais peut être un angle intéressant. C'est finalement dommage d’esquiver l'éclaircissement de celle-ci de façon interne, de ne pas travailler les remords, les pulsions, les raisons d'un tel acte. De façon plus insinuée les codes du genre vont servir une autre enquête, plus abstraite. Le climat devient naturellement très suspicieux et pas forcement dans le sens envisagé. Petit à petit les rôles qui entourent Marc se retrouvent en position de suspects. C'est probablement Richard, en commençant par le suivre, qui créer en premier cette méfiance.
Denis Podalydès par l'imposante présence de son personnage est rapidement irritant à l'écran. Par le biais aussi de Mathieu Amalric il devient intrus. Son attirance pour Marianne peut apparaître intéressée et d'avantage liée au frère de celle-ci. Karin Viard est une sœur possessive et jalouse, profil parfait pour une coupable. Elle y apporte assez de névrose pour nourrir ce mystère. La rencontre avec Anna semble trop hâtive et idéale pour sonner vraie. Douce veuve meurtrie, Maïwenn gagne facilement les cœurs. Enfin Sara Forestier, jeune amoureuse qui court désespérément après son idole de prof. Rôle apparemment encore très bad-girl, l'actrice révélée dans L'Esquive surprend encore juste après sa prestation dans Suzanne. Par petites touches progressives elle apporte de la naïveté à son personnage. Plus sensuelle qu'elle ne l'a jamais était, son travaille sur la voix est précieux.
Ce polar suggéré prend place dans un cadre à deux piliers. Le paysage Alpin, idée géniale jusque dans l'utilisation du bâtiment universitaire, et l'érotisme. La fougue et la jeunesse d'Annie effraie, la position incestueuse de la relation avec Marianne gêne et la beauté suggestive d'Anna est aveuglante.
De tout cela ressort pas mal de bonnes idées. Il en résulte malheureusement un film pas vraiment captivant et qui manque grandement de concret. La première partie du film à beau passer plutôt vite, il n'en découle absolument rien d'autre qu'une mise en place poussive. Une fois les personnages dessinés le récit s’accélère et cela devient plus saisissant. L'image et le propos finissent par être plus nets. Si le film ne démarre pas au mieux c'est sans doute à cause d'une réalisation pas franchement maîtrisée. Photographie mouvementée et sombre, qui provoque un résultat trop imprécis et pas joli du tout.
Intrigue intéressante dans son originalité et sa finalisation (conclusion qui donne un sens au titre en détournant l'idée du crime) mais plombée dans une mise en scène approximative. Les frères Larrieu utilisent très bien les décors naturels et architecturaux choisis et surtout le magnifique casting à leur disposition mais pêchent incroyablement dans tout le reste.