Domicile conjugal ?
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Commencé pendant l'âge d'or de la nouvelle vague, le cycle des contes moraux s'achève avec L'Amour l'Après-Midi, un sixième chapitre sorti en 1972. Ce qui unit ces six films ce n'est pas tant leur objectif pédagogique, d'ailleurs je trouve cette dénomination de "contes moraux" moyennement pertinente. Leur point commun, et ce qui fait leur intérêt c'est cette vision de l'amour, lucide et en même temps atypique pour l'époque.
L'amour chez Rohmer n'est qu'une pulsion, un désir momentané qui s'estompe une fois le vide comblé. Un peu comme un appétit satisfait par une grosse plâtrée de pâtes. C'est cette curiosité de l'Homme qui le pousse à exploré l'inconnu. Une définition de l'amour qui pourra faire crier d'effroi les féministe, car c'est l'envie de toucher, de posséder, de dominer cet obscur objet du désir, comme dirait Buñuel. Pour autant Rohmer fait toujours la distinction entre cet amour irraisonné, hérité des origines bestiales de l'Homme, et ce qu'on appellerait naïvement le "véritable amour", celui qu'on nous vend dans tout les romans à l'eau de rose, qui se définit par une sorte d'alchimie parfaite entre deux êtres. Cet amour là existe aussi chez Rohmer, et malgré sa propension à nous dépeindre le premier type, pour lui c'est le second qui compte vraiment. C'est celui qui finit par gagner. Et c'est encore plus net dans L'Amour l'Après-Midi.
Frédéric est un cadre supérieur ordinaire, marié, un enfant, un deuxième en route, et un emploi du temps bien rangé. Son hobby c'est de s'asseoir sur un banc quelques minutes et d'observer les femmes qui passent, admirer leurs formes, leurs classes, cette grâce privilège du sexe féminin. Ne lui jetez pas la pierre, Fred n'est pas un satyre lubrique. Au fond il ne dérange personne. Il aime les femmes, en plus d'aimer sa femme, et satisfait innocemment son petit penchant voyeuriste.
Ca se complique quand (re)fait irruption dans sa vie peinarde Chloé, une des ses anciennes connaissances. A l'époque il n'y a pas gouté, et pourtant c'est pas l'appétit qui lui manquait. Et à attendre parler la dame on devine rapidement que c'est réciproque. Elle est belle, elle est fantasque, c'est à la fois une femme indépendante et une demoiselle en détresse. Bref, elle est tout ce qu'il y'a de plus désirable.
Grâce à ce portrait d'un homme tiraillé entre deux femmes très différentes et qu'il aime de différentes façons, Rohmer raconte l'amour de la plus belle des manière. Une vision très lucide de ce qui est un simple désir curieux, mis en opposition avec une profonde compréhension mutuel que Frédéric partage avec sa femme. Peut-on jongler entre les deux? Frédéric peut-il mener sa petite vie perso et voir Chloé pendant la journée, puis retrouver sa femme et sa vie de famille le soir venu comme si de rien n'était?
C'est tout le propos du film, qui est bien un conte moral. Rohmer averti le spectateur (pas seulement masculin d'ailleurs) des dangers qu'il peut y avoir à confondre ses pulsions avec le fait de tomber amoureux. Dit comme ça, on pourrait tenter une comparaison avec ses comédies romantiques où le héros fonce à l'aéroport pour rattraper sa belle. Mais c'est beaucoup moins cliché et mielleux, et le propos y gagne en crédibilité. Non, décidemment il n'y a pas mieux que Rohmer pour raconter une vraie histoire d'amour.
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Créée
le 1 déc. 2018
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