Le titre original "l'OEil de l'aiguille" est devenu bizarrement L'Arme à l'oeil par la grâce d'un traducteur désireux de faire un jeu de mot, même si je me suis toujours demandé quel en était le sens, alors que le titre original reprend exactement le titre du très bon roman de Ken Follett, bien plus explicite puisque "l'Aiguille" est le nom de code de Faber, cet espion nazi en place en Angleterre. Incarné par un excellent Donald Sutherland qui a tendance à supprimer ses ennemis avec un stylet, d'où le surnom "l'Aiguille", c'est un sale type, impitoyable, insensible, qui tue tous ceux qui se mettent en travers de son chemin, afin de renseigner sur les mouvements de troupes britanniques. Après L'Aigle s'est envolé en 1976, Sutherland campait encore un espion nazi basé sur les îles britanniques, et là c'est un méchant délectable.
Lors de mon premier visionnage en VHS dans les années 80, j'avais moyennement apprécié ce film qui se place comme Triple Cross ou Opération Crossbow dans la catégorie des films d'espionnage en temps de guerre, ici la Seconde guerre mondiale, où "l'Aiguille" va découvrir que les Alliés ont enfumé les Allemands en faisant croire que le Débarquement prévu en 1944 allait se dérouler dans le Pas-de-Calais.
En le revoyant plus tard, et puis récemment, j'ai appris à mieux apprécier le film qui utilise parfaitement le cadre historique, distille un suspense de plus en plus angoissant, et mélange curieusement la romance à ces éléments, probablement que cet amour interdit entre cet espion nazi et une Anglaise qui croit qu'il est Anglais, ne m'avait pas paru compatible dans un tel sujet, et puis au final, c'est pas si mal, d'ailleurs c'est ce qui perdra l'espion qui accomplit son travail imperturbablement tout en s'adonnant à un amour fou. Sutherland et Kate Nelligan (actrice peu connue qu'on a rarement revue), font très bien passer ces sentiments.
Le film possède une facture typiquement britannique, aidée aussi par le décor de cette île écossaise, la photo de Alan Hume et la musique de Miklos Rosza, qui signe son avant-dernière partition pour le cinéma. Il y a des péripéties, une chasse à l'homme assez prenante, et un final redoutable, dans un style proche d'une ambiance hitchcokienne (on pense à Cinquième Colonne surtout), mais je n'ai pu m'empêcher de relever une certaine lenteur par endroits qui nuit un peu à l'intrigue, heureusement ce n'est pas bien grave. Le film qui est une scrupuleuse adaptation du roman de Follett, eut un assez joli succès en 1981, ce qui décida George Lucas à choisir Richard Marquand pour réaliser ensuite le Retour du Jedi. Après un premier film à teneur fantastique, Psychose phase 3 qui n'avait pas trop convaincu en 1978, Marquand grâce à ce second film, était sur les bons rails.