Le documentaire, réalisé pour les 40 ans des événements, sort des sentiers battus en se focalisant, non pas sur les évènements parisiens de mai 1968 mais sur ceux qui se sont déroulés à Nantes, ainsi que sur leur origine, plus économique que sociologique. Il donne aussi la parole aux opposants (préfet de région, gaullistes, directeurs d’entreprises) malgré leurs propos grotesques et/ou outrageux. A Nantes, il y avait déjà eu des manifestations étudiantes en février 1968 pour réclamer le paiement des bourses et qui ont été sévèrement réprimées par la police. D’autres manifestations ont eu lieu le 8 mai en raison des mauvaises conditions de travail dans la sucrerie Say de Nantes ainsi que dans les chantiers navals. Cela a débouché sur l’attaque de la préfecture le 13 mai, en marge du défilé de 20 000 manifestants. Le préfet de région, Jean-Emile Vié (1915-2015) voulait alors tirer (sic) sur les manifestants ! On est bien loin du préfet de police de Paris, Maurice Grimaud (1913-2009) qui a tout fait pour éviter des morts à la même époque. Le réalisateur souligne l’importance de Nantes avec la 1ère occupation d’usine et de séquestration de son directeur, Paul Duvochel, à l’instigation d’Yvon Rocton (1938-2008) le 14 mai, par les ouvriers de Sud Aviation à Bouguenais (où étaient construits le Concorde et la Caravelle). C’est le facteur déclenchant de la grève générale du 15 mai (avec une prise en charge par les syndicats, de l’économie locale pour éviter un blocage total préjudiciable aux plus démunis). Le 24 mai se déroule le défilé des paysans [sous l’égide de Bernard Lambert (1931-1984)] à Nantes, qui s’associent aux ouvriers et aux étudiants. Même l’évêque Mgr Vial soutient les grévistes. Le 27 mai, devant le refus des syndicats de négocier, le général de Gaulle dissous l’Assemblée nationale. Sud Aviation reprend le travail le 14 juin et les élections législatives ont lieu les 23 et 30 juin, au profit du parti gaulliste qui a récupéré le mouvement en se référant à la Résistance (datant de 28 ans) et profitant du fait que les jeunes de moins de 21 ans ne votaient pas… le réalisateur termine son film en évoquant l’existence d’entreprises autogérées et la perception des femmes sur mai 1968 qui les a libérées car elles ont pu prendre la parole. Il n’y a eu, néanmoins, que 3 affiches où figuraient des femmes parmi toutes celles éditées alors.