Bien que n'étant pas un grand fan de Robert Taylor, je dois admettre que les rôles de vieil ours solitaire et mal léché lui vont à merveille. C'était le cas notamment dans deux de ses meilleurs westerns, La Porte du diable (1950) et Convoi de femmes (1951), et ça l'est à nouveau ici. Il interprète Bushrod Gentry, trappeur de son état dans le Kentucky de la fin du XVIII° siècle, à l'époque où la Frontière n'était guère plus à l'ouest que les Appalaches. Entre deux chasses au castor, ce rude bonhomme revient faire un peu de commerce en « ville », où il est à chaque fois obligé d'esquiver les avances de femmes en quête de mari. Un beau jour, attaqué par des Indiens Shawnees, il est secouru par une jeune fille nommée Mary Stuart Cherne, qui à son tour se met en tête d'en faire son époux. Malgré tous ses talents de coureur des bois, Bushrod aura bien du mal à semer la flamboyante rouquine, aussi à l'aise sur la piste, fusil en main, qu'en cuisine ou à la ferme...
L'Aventure fantastique est une sympathique comédie qui traite d'un thème récurrent du cinéma américain : le mariage - auquel le titre français d'ailleurs fait clairement référence. Essentiellement tourné en extérieurs, dans les grandes forêts sauvages de l'Est, le film de Roy Rowland immerge parfaitement le spectateur dans le quotidien des premiers colons, soumis au rude traitement de la vie dans la nature et touchés, de temps à autre, par la modernité (ici un vendeur de lunettes). Toujours bourru, macho et prompt à la bagarre, Taylor se régale dans son rôle de trappeur farouchement indépendant, qui se découvre peu à peu un cœur d'homme. Face à lui, la splendide Eleanor Parker excelle en jeune femme aventureuse, un brin manipulatrice et totalement incontrôlable. Grâce enfin à quelques rôles secondaires savoureux, notamment Victor McLaglen en patriarche écossais myope et Ralph Moody en vieil Indien sarcastique, Many Rivers to Cross se révèle un divertissement entraînant, léger et réussi.