Nicolas Vanier en aurait-il fini avec son envie de nous emporter sur grand écran avec ses expéditions dans le Grand Nord, qui ont jusque-là fait sa réputation d’explorateur incontournable ? Est-ce un désir de délaisser des films tels que Le dernier Trappeur ou encore Loup pour se tourner vers un cinéma beaucoup plus personnel et nostalgique ? C’est ce que le réalisateur semble vouloir nous faire croire en s’attaquant à sa propre enfance et en nous la partageant par le biais de longs-métrages évocateurs. Comme ce fut le cas en 2013 avec Belle et Sébastien, qui était pour lui l’occasion de présenter à la nouvelle génération l’œuvre de Cécile Aubry qui l’avait autrefois bercé. Une franche réussite, se résumant à de bonnes critiques et un score au box-office fort honorable (plus de 3 millions d’entrées). Et se traduisant également par la mise en chantier d’une suite, cette fois-ci réalisée par Christian Duguay (Planète Hurlante, Jappeloup…) et qui, justement, n’avait pas cette fibre nostalgique habitant le premier volet. Mais plutôt que de retourner conter les aventures de ce petit garçon et de sa chienne, Vanier a préféré s’atteler à l’adaptation de son propre livre, L’école buissonnière, dans lequel il narrait via la fiction son enfance en Sologne. Son amour pour cette région française où il forgea sa passion pour la nature que tout le monde connait aujourd’hui.
L’histoire de son livre/film se prête d’ailleurs très bien à cette découverte de la vie sauvage qui nous entoure. Bien que celle-ci se déroule au lendemain de la Première Guerre mondiale afin de donner un cadre à l’ensemble, L’école buissonnière décrit comme il faut l’éveil de cet enfant qu’avait été Nicolas Vanier. Que nous devrions être, même encore à nos âges, plutôt que de se perdre dans une société régie par le stresse, l’individualisme et – surtout – le désintéressement total de notre milieu. C’est pour cela que de se plonger durant deux bonnes heures dans ce long-métrage va vous faire un bien fou ! Alors oui, le scénario n’est pas des plus originaux et ne cherche nullement à innover le genre. Mais avec Nicolas Vanier à la barre, filmant la nature comme lui seul sait le faire (il prend son temps à poser sa caméra devant le moindre paysage, le moindre animal), vous serez irrémédiablement emportés dans une ode à la vie au combien rafraîchissante. Même dans votre fauteuil de cinéma ou bien de salon, vous partirez vous aussi, tout comme ce jeune garçon, dans un tout autre monde pourtant à portée de mains pour échappez aux soucis de la vie quotidienne (concernant le héros, il s’agit surtout de sa situation d’orphelin). En bref, vous évadez !
Et pour cela, Nicolas Vanier fait appel à ses talents de metteur en scène pour nous présenter cette histoire qui fonctionne avant tout grâce à la simplicité et à la tendresse qui en découlent. Alors que certains films français du même acabit perdraient leur temps et leur argent à vouloir nous en mettre plein la vue, à forcer le trait pour nous toucher, L’école buissonnière raconte son histoire avec le plus grand naturel du monde. Le seul aspect tape-à-l’œil qui aurait très bien pu lui nuire, c’est son casting pour le moins cinq étoiles qu’il proposait (François Cluzet, Eric Elmosnino, Valérie Karsenti, François Berléand, Laurent Gerra…). Mais même cela, Vanier parvient à éviter l’écueil en dirigeant ses comédiens comme il faut. Ces derniers faisant vivre leur personnage respectif sans jamais en faire trop. Se cachant derrière leur rôle au point d’être méconnaissables par moment (mention spéciale à Cluzet et Gerra). Et surtout, le réalisateur semble avoir un œil certain pour dénicher les jeunes talents ! Après Félix Bossuet pour Belle et Sébastien, c’est au tour de Jean Scandel de crever l’écran et de porter sans aucun mal L’école buissonnière sur ses épaules. Un comédien à suivre !
Le seul bémol que l’on pourrait soulever dans ce long-métrage, c’est le fait que, dans sa dernière partie, le film se fasse rattraper par son cadre, par la fiction qu’il exploite. Délaissant étrangement ce qui faisait son charme (cette déclaration d’amour pour la nature et la simplicité, malgré tout un passage sur un grand cerf), L’école buissonnière se perd dans une intrigue familiale cousue de fil blanc qui donne plus l’impression de meubler qu’autre chose. D’avoir été ajoutée à l’ensemble parce que Vanier ne savait pas trop comment terminer son histoire car n’ayant pas explicitement de rapport avec le reste du film, et semblant sortir un peu de nulle part. Comme en témoignent des transitions et évolutions beaucoup trop abruptes dans le scénario, qui en surprendront certains (telle la relation entre les personnages de Cluzet et d’Elmosnino, qui deviennent sans raison les meilleurs copains du monde alors que l’un passait son temps à chasser l’autre). Ce n’est pas honteux et cela reste plaisant et touchant dans l’ensemble, mais cela s’avère plutôt inutile comparé à l’ensemble du long-métrage. Vraiment dommage d’en arriver à un tel constat…
Cela étant, L’école buissonnière reste une œuvre qui saura émerveiller le temps de son visionnage. Qui éveillera notre âme d’enfant, notre passion pour la nature et les choses simples de la vie. Et, le plus important, nous emportera le temps de son visionnage bien loin des tracas du quotidien pour nous inciter à profiter de ce qui nous entoure. D’avoir un tout autre regard sur le moindre animal et végétal de notre milieu naturel, même le plus insignifiant au premier abord. Nous incitant ainsi à le respecter, à vouloir en prendre soin pour le préserver. Nicolas Vanier, par ses nombreuses expéditions, à toujours voulu nous enseigner cette leçon. Il y parvient encore avec une histoire plus simple, dans un tableau beaucoup bien plus accessible que le Grand Nord. Une fois de plus, pas besoin d’en faire tout un travail clinquant pour offrir aux spectateurs une parenthèse revitalisante !