Le dernier Gondry : une production d’effets indésirables

Le mariage Vian/Gondry semblait heureux; le romantisme de l’un, l'ingéniosité de l’autre, la proposition n’est pas dissonante. Annonce du casting : Amélie-Tautou, Duris qui se promène à peu près dans toutes les productions françaises, l’intouchable Sy, le chouchou Elmaleh, Miss Charlotte Le Bon pour les têtes d’affiche. Chabat, Laffite and co pour les apparitions, Woodkid au son… name-dropping orgiaque, tant pis pour la prise de risque. D’emblée, le choix de faire incarner Colin et Chloé, héros pas spécialement bankable, à des acteurs compilant les rôles avec une image cinématographique ou médiatique forte est étrange, l’imaginaire se délite déjà un peu.

Premiers objets dévoilés, la capsule-nuage, la voiture transparente… allons voir ce que ça donne.

Avertissement : ce film exige une bonne acuité visuelle, pour le public aussi myope que Jean-Sol Partre, le visionnage peut s’avérer douloureux tant les images s’empilent à une vitesse déconcertante.

Il ne faut pas plus de 10 minutes au réalisateur pour signer un film indigeste avec une protubérance de gadgets « Do It Yourself » version Hollywood (le made in Gondry coûte quand même la modique somme de 20 millions de balles). Présentation du pianocktail et autres objets phares, avalanche d’effets post-prod, urgence à déployer la virtuosité du chef déco, cité en 2e position au générique, ce qui en dit long sur la finalité du projet et aux rangs accordés à la direction d’acteurs, à la mise en scène, aux choix artistiques pourtant nécessaires à l’adaptation d’une œuvre littéraire.

Faire le tri, chercher la poésie, trouver la prouesse technique, sourire et se raviser la seconde d’après, voilà à peu près à quoi ressemble le vagabondage visuel du spectateur.

Gondry s’appuie sur Vian et vlan, tout fout le camp. L’univers dense et singulier du réalisateur n’a pas besoin de support et ne se prête donc pas à l’adaptation, le dosage des imaginaires de deux univers est mal évalué puisque l’image l’emporte toujours à plates coutures. Alors, oui l’histoire est respectée (presque à la lettre), aucune largesse avec l’œuvre originelle n’est à relever et c’est le défaut le plus flagrant du film finalement ; une adaptation minutieuse, pointilleuse mais disséquée, scolaire et dépourvue d’émotions. On ressort avec l’ennuyeuse impression d’avoir assisté à une version cinématographique du profil de l’œuvre (les petits livres rouges des éditions Hatier qui ont sauvé de nombreux bacs de français).

Générique (décidément, instructif !) : Luc Bossi au scénario, Luc Bossi à la production aussi. Le problème réside peut-être là ; l’imaginaire associé à la recette pécuniaire et à la démonstration de capacités techniques n’est sans doute pas la bonne combinaison pour réussir un film à la résonance collective aussi puissante.

Sans compter que certains livres n’ont pas besoin d’être dérangés, il suffit juste de les laisser sur une étagère en s’assurant de temps à autre qu’ils jaunissement joliment et uniformément aussi bien dans nos bibliothèques que dans nos souvenirs.

Flora
Floruspocus
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le 28 avr. 2013

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