Il faut toujours se méfier de ses propres grilles de lecture cinéphiles. Ainsi, La Jauría, le premier long-métrage de Andrés Ramírez Pulido pourrait âtre vu, de prime abord, comme une réflexion sur l'incapacité des habitants d'un pays, en l'occurrence la Colombie, à sortir d'un cercle de la violence ancré dans les mentalités depuis plusieurs décennies. Lorsqu'il est interrogé sur la question, le cinéaste conteste en partie cette vision, considérant que son but touche à une certaine universalité, concernant la part d'humanité qui est plus ou moins en chacun de nous. Ou autrement dit à la lutte éternelle entre l'obscurité et la lumière, particulièrement illustrée par le personnage principal de La Jauría. Le film explore par ailleurs une troisième voie, qualifiable de surnaturelle ou si l'on préfère, d'invisible. La technique de Ramírez Pulido, impressionnante, est en adéquation avec son sujet, qui s'échappe de la facilité et peut déconcerter, au moins dans ses énigmatiques premières minutes. Au sein d'un cinéma colombien qui reste cependant obsédé par la violence (on y revient) Monos et Los Reyes del mundo pourraient être rapprochés de La Jauría mais c'est ce dernier qui laisse finalement percer le plus d'espoir, même ténu. Et ce, de sa propre manière, rude à nos yeux, mais là encore le réalisateur aime à remettre les choses dans un contexte différent, confiant que lors des projections en Colombie, les rires ne manquaient pas du côté des spectateurs, des plus jeunes notamment. Toujours une affaire de grille culturelle, évidemment, la chose la plus certaine étant qu'il faut déjà inscrire Ramírez Pulido parmi les nouveaux réalisateurs latino-américains à suivre de près.