Une fois de plus, le masqué se distinguera par son mauvais goût qui a tout du légendaire.


Parce qu'il avait bien aimé, à l'époque, le Vidocq de Pitof, même si celui-ci est sans doute lardé de défauts, dont le premier d'entre eux commence par G... et finit par ...uillaume Canet. Son atmosphère, son méchant ultra charismatique aux accents fantastiques, son héros qui a tout du taureau furieux...


Ce que l'on sait moins, c'est que ce projet a coupé l'herbe sous le pied d'un scénario qu'Eric Besnard portait depuis un bail (25 ans aujourd'hui) et avait donc été remisé dans les cartons en attendant meilleure fortune et que le nom de Vidocq s'estompe...


Ce n'est donc qu'aujourd'hui que ce scénario, L'Empereur de Paris, voit le jour, sous la caméra d'un Jean-François Richet qui refait équipe avec Vincent Cassel dix ans déjà après le diptyque criminel consacré à Mesrine.


L'Empereur de Paris fait table rase. Adieu le fantastique et ses effets spéciaux ostentatoires. Adieu l'aspect enquête sur les traces de sa figure de proue. Adieu son côté inventeur et son goût du déguisement. Place à un personnage terre-à-terre et étranglé par un sentiment de solitude pénétrant. A un personnage défini comme un véritable sanglier, dans le Paris qui côtoie les ors de l'empire et les bas fonds crottés. Le tout dans une reconstitution immersive, maître-mot d'un cinéaste dont la minutie, le souci du détail et de la véracité sont immédiatement attrayants pour un spectateur qui ne pourra qu'être conquis par cet aspect de l'entreprise.


Vidocq s'inscrit dans la lignée de ces figures chères au réalisateur, de ces hommes qui sont à la marge, qui se révèlent dans l'action et qui n'ont pas le choix. Le film, lui, s'intéresse à ce moment où la figure historique bascule, dans une solitude mythologique et silencieuse. L'ex bagnard rassemble bien une bande à sa solde, mais celle-ci fera long feu. L'homme est connu pour ses dons d'enquêteur, il se livre plutôt, dans cet Empereur de Paris, à une traque implacable du milieu parisien.


Le film déstabilise parfois, reprenant à son compte certains codes du western US, rapprochant Vidocq d'un certain Wyatt Earp. Mais le film ressuscite de manière assez flamboyante et classe l'art du feuilleton et une certaine idée du cinéma populaire et ambitieux. Celui qui avait cours dans les années 70 et que l'on a tenté de réanimer dans les années 2000 avant que la comédie française ne privatise sauvagement le temps de cerveau disponible.


La générosité de Richet est ici manifeste, tout comme sa maîtrise d'une période qu'il avoue connaître sur le bout des doigts. Le casting de gueules, lui, impressionne, tandis que le masqué a passé un très bon moment tout en renouant avec un de ses amours les plus récents : la sublime Freya Mavor, dont la beauté incandescente a enflammé à nouveau son petit coeur en sucre.


L'Empereur de Paris a beau être d'un classicisme absolu dans son déroulement, souffrant d'un aléas rythmique dans sa deuxième partie un peu moins inspirée et d'une musique parfois mal calibrée, le spectateur conquis ne pourra que soutenir une entreprise aussi généreuse et ne manquant pas d'ambition. Un projet aussi rare que séduisant à l'échelle d'un cinéma français parfois bien moribond et sans aucune prise de risque.


Vidocq est bel et bien vivant.


Behind_the_Mask, en pleine reconstitution du crime.

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le 4 nov. 2018

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