J'avais été fortement secoué par ce film lors de sa sortie et ce deuxième visionnage me laisse à nouveau sur le flanc. Au contraire de l'adaptation (assez inintéressante) par Nicole Garcia (1) qui collait de très près au roman, Laurent Cantet s'empare du sublime matériau que représente "L'Adversaire" de Emmanuel Carrère (2) pour mieux s'en détacher et créer ainsi une œuvre personnelle et passionnante. Quasiment bressonnien dans son approche, Cantet refuse toute forme de sensationnalisme et n'a en réalité qu'un but : faire du cinéma, ce qui est très rare quand on a en toile de fond un fait divers.
Certes on peut dire de Cantet qu'il est un cinéaste du social mais il ne faudrait surtout pas penser que son cinéma se résume à cela. Après un premier film quasi-documentaire formidable, "Ressources humaines" (3), il s'attaque ici, par le prisme du rapport malsain homme-travail, au tréfonds de l'âme humaine, et par une réalisation tranchante comme une lame, nous secoue, nous interroge , nous fait mal.
A noter qu'il a réalisé depuis deux autres films qui confirment sa volonté de questionner en profondeur la société : "Vers le Sud" (4) et "Entre les murs" (5).
(1) http://www.senscritique.com/film/L_Adversaire/386631
(2) http://www.senscritique.com/livre/L_Adversaire/497867
(3) http://www.senscritique.com/film/Ressources_humaines/496684
(4) http://www.senscritique.com/film/Vers_le_sud/410646
(5) http://www.senscritique.com/film/Entre_les_murs/critique/6845623