Incroyable épopée autant montagneuse que romantique située essentiellement dans une région alpine des Dolomites, marquée par une introduction traumatique par excellence : un alpiniste voit sa femme mourir dans un accident, une chute mortelle dans une crevasse lors de leur ascension du Piz Palü en pleine lune de miel. Sur la base de ce petit bout de scénario, on pourrait presque identifier une parenté avec Cliffhanger si l'on n'avait pas peur d'un tel hiatus... Mais en un sens, L'Enfer blanc du Piz Palü reste l'un des premiers grands spectacles cinématographiques en milieu montagneux et l'un des derniers films de Leni Riefenstahl avant qu'elle ne passe derrière la caméra pour La Lumière bleue.
Sur la durée conséquente de 2h30, on peut relever quelques problèmes d'ordre technique, à commencer par une certaine répétitivité au sein de certaines séquences : l'appel des secours notamment, depuis la corniche où les protagonistes sont bloqués lors du dernier temps fort, à la fois prisonniers et réfugiés, se fait un peu trop insistant et nuit de manière assez drastique à l'intensité de la situation. Il manque aussi une certaine construction psychologique des personnages, qui se fait usuellement par les dialogues dans cet écrin du muet, mais ici réduits à un minimal vraiment extrême. La folie du docteur Krafft consécutive à la mort de son épouse est également sujette à quelques passages un peu exagérés autour d'une nouvelle obsession, partagés entre le désuet et le suranné.
Mais ce film de Arnold Fanck (aidé par Georg Wilhelm Pabst) regorge, en parallèle de ces réserves, de morceaux savoureux en matière d'opposition entre une humanité désireuse de repousser ses limites et la nature qui se pose en frein majeur aux ambitions prométhéennes des alpinistes téméraires. L'accident inaugural, les différentes ascensions au milieu de ces étendues de neige immaculée, la mission de sauvetage sous la forme d'une expédition nocturne, et toute une série de plans tournés dans un cadre saisissant de haute montagne. La mise en scène de ce Piz Palü est le véritable point fort du film, avec son manteau neigeux, ses falaises glacées, ses crevasses, ses stalactites en train de fondre, ses tempêtes glaciales, ses avalanches, et autant de réactions face aux tentatives des pauvres petits humains.
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