Je n'avais pas revu ce film depuis une éternité et l'avais noté de mémoire ; revu récemment, je maintiens cette note car il y a des passages un peu creux et quelques flottements peu excitants. Sinon, c'est une fable moderne réussie, une sorte de road trip dans une Amérique profonde typique des années 70, l'Amérique de la marginalité, loin du clinquant et des paillettes hollywoodiennes. Le style documentaire partage l'écran avec l'émotion des situations, tout comme la mise en scène sait mettre en valeur les temps forts (le strip tease de Hackman dans le bar) et reste attentive à l'instant fugitif où s'expriment l'accord ou le désaccord des héros.
Jerry Schatzberg fait partie du Nouvel Hollywood qui a émergé entre la fin des années 60 et le milieu des années 70, dans tous ses films, il présente une Amérique marginale et des personnages en quête d'eux-mêmes. A travers le parcours sur les petites routes de campagne, de 2 paumés, 2 anti-héros typiquement américains, il dresse le portrait de cette autre Amérique que le public n'a pas l'habitude d'idéaliser. Ses 2 traine-savates ne sont pas vraiment des pouilleux et ne sont pas mal à l'aise dans la société et le rêve américain en cherchant à les fuir, au contraire, ils en sont exclus et cherchent plutôt à s'y intégrer. Mais leur comportement d'histrions les maintient en marge face à un ordre social qui ne veut pas les accepter.
Malgré son ton pessimiste, le film réserve des moments drôles, possède une chaleur humaine et des personnages attachants, il fut couronné par la Palme d'or du Festival de Cannes 1973, et fut salué pour l'interprétation exceptionnelle de ses 2 acteurs principaux. Pourtant, autant je trouve Gene Hackman fabuleux dans sa violence intérieure et son allure de "bogeyman", autant je trouve Pacino assez moyen dans ce type de rôle, comme si ça ne lui allait pas ; il sortait tout juste du rôle de Michael Corleone dans le Parrain, et là je l'ai trouvé assez peu raccord dans son jeu pour suivre Hackman, moins éclatant, c'est l'impression que j'ai...