Bof-Fils !
Il faudrait peut-être dire à Catherine Breillat que les années 1970 sont loin derrière nous, qu'on ne peut plus choquer le bourgeois ou l'affrioler avec des scènes de cul, mettant en scène un...
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le 17 sept. 2023
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Catherine Breillat n’a pas été épargnée par la vie, c’est le moins qu’on puisse dire : son retour à Cannes après un AVC et des années où elle a été sous emprise d’un homme qui l’a exploitée, avec un film aussi « différent » de la production française « standard » que l’été dernier, est forcément une raison de se réjouir. Il reste que cette histoire, proche des sujets troubles que la réalisatrice a toujours explorés, avec un goût certain pour la provocation facile, se révèle sur la longueur beaucoup plus anodine, et surtout plus maladroite, qu’on l’espérait.
Breillat exploite ici le cliché le plus usé du porno, celui la belle-mère MILF séduisant son beau-fils – dans l’été dernier, même pas majeur – jusqu’à mettre en péril son couple bourgeois, lorsque l’adolescent se met à prendre visiblement très au sérieux ces parties de jambes-en-l’air avec sa blonde séductrice. Il s’agit donc, à partir du sujet que l’on qualifiera de « semi-inceste » où se mêlent consentement et emprise (mais de qui sur qui ?), justement, de mettre le sexe et l’amour à l’épreuve des compromis bourgeois. Et ensuite ? Eh bien, pas grand chose. L’ambiguïté de certaines scènes, réellement « gênantes » pour le spectateur (et c’est là la principale qualité du film), ne débouche sur aucun véritable drame, mais sur une conclusion en forme de fondu au noir qui montre l’acceptation générale de l’inacceptable. Pour ne pas faire de vagues. Sans d’ailleurs qu’il n’y ait non plus de scandale dans cette hypocrisie, puisqu’il est toujours possible d’y trouver une preuve d’amour.
En fait, si scandale il y a, c’est bien que Breillat ait réalisé un film aussi indécis, aussi tiède, clairement gâché par son retournement final contredisant l’hypothèse séduisante d’une Anne (Léa Drucker) froide manipulatrice : si le point de départ du film laissait anticiper une belle brutalité, l’été dernier ne tient pas ses promesse en la matière.
Et puis il y a ce gros problème d’écriture du film, Breillat doublant son intrigue principale de scènes représentant le travail quotidien de son héroïne, avocate protégeant les personnes victimes d’abus : cette mise en perspective potentielle de ce qu’Anne fait dans sa vie privée par rapport à ce qu’elle défend professionnellement aurait également mérité d’être creusé, mais en l’absence de toute réflexion sur le sujet, on peut même se demander si le but de ces apartés n’est pas finalement de dédouaner notre héroïne, en la présentant comme « femme de bien », par rapport par exemple à son confrère lui extorquant de l’argent contre la menace d’un scandale. Tout cela est définitivement gênant quand on espère un film courageux, ou au moins un point de vue anti conventionnel.
On n’échappe pas non plus à une véritable ringardise dans la représentation des émois amoureux comme des actes sexuels, qui évoque plus le cinéma français bas de gamme des années 70 qu’une quelconque contemporanéité. Ce sentiment embarrassant de regarder du cinéma complètement dépassé est accentué par des dialogues clairement datés XXème siècle, ou en tous cas écrits par des gens qui ne vivent pas dans la vie réelle, et qui ne fréquentent aucun adolescent d’aujourd’hui (Bonitzer a été un grand scénariste, mais il lui faudrait sans doute arrêter !)…
Il reste une raison valable de regarder l’été dernier, c’est la prestation – excellente – de Léa Drucker, et on rêve de ce qu’elle aurait pu nous offrir dans une histoire mieux écrite, et si elle avait été filmée avec plus de talent.
[Critique écrite en 2023]
Créée
le 16 sept. 2023
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