L'immersion est franche, autant dans le sujet du film (une mission spatiale du côté de Vénus suite à la découverte d'un objet mystérieux dans le désert de Gobi) que dans son contexte de production (la science-fiction des années 50-60 d'un point de vue pour le moins original, l'Allemagne côté RDA). "L'Étoile du silence" aura donc à ce titre deux appréciations possibles : d'un côté la dimension kitsch extrême, digne héritière de la SF de la décennie précédente avec son cortège d'artéfacts désuets et de discours scientifiques creux (qui ont certes persisté dans le temps et jusqu'à aujourd'hui dans ce registre), avec ses costumes colorés en plastique et ses décors cheap en carton, et de l'autre côté sa conception universaliste et collective de l'exploration spatiale, avec une expédition menée sans leader et constituée de personnalités internationales.


Sans surprise c'est le côté suranné à l'excès de l'ensemble qui domine. En 1960, on est encore loin du premier pas des astronautes de la mission Apollo 11 sur la lune de 1969 et on s'imagine que dans un futur proche, il y aura une station spatiale sur le satellite naturel et on pourra voyager à a vitesse de la lumière sans aucun problème. On imagine aussi des robots dans la lignée de ceux visibles dans "Planète interdite", en l'occurrence ici un brouillon de R2D2 avec lequel on peut jouer aux échecs et auquel il suffit de rajouter un microprocesseur pour lui conférer une âme (comprendre : laisser gagner l'humain de temps en temps). Les vaisseaux et les laboratoires regorgent de boutons qui clignotent dans tous les sens, les écrans arborent des signaux qui n'ont aucun sens, et les scientifiques abondent en discours ineptes pour résoudre des énigmes à coups d'idées de génie.


C'est un film bavard et long à se mettre en place, et qui témoigne de manière intéressante l'avance technologique du bloc de l'est à cette époque — le cosmonaute russe de l'équipe, plein de compassion, tend la main à son homologue américain pour l'accompagner. Et puis vient le temps de la mission, qui aura tôt fait de dévoiler ses intentions idéologiques et le reflet des angoisses de l'époque : le message reçu par la Terre était en réalité une déclaration hostile, et les extra-terrestres semblent avoir été annihilés par leur propre arme de destruction massive. À travers le personnage japonais féminin, dont la mère fut tuée à Hiroshima, tout le discours anti-nucléaire se déploie en montrant une autre catastrophe planétaire du système solaire.

Morrinson
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le 24 juin 2024

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