Disons le tout de suite, je ne le connais pas le roman de Camus... Ceux qui l'ont lu ont l'air de considérer cette adaptation ratée et très faible. Découvrant donc l'histoire et le personnage directement sur l'écran, j'avoue avoir trouvé le résultat vraiment intéressant. Sans doute pas aussi passionnant que cela aurait pu l'être mais certainement pas honteux ou dispensable.
Il y a une sorte de déliquescence existentialiste que j'ai trouvé très originale à défaut d'être viscérale. A ce titre, le recours à une voix off est une réelle facilité qui aurait mérité d'être traité plus visuellement comme l'est le tout dernier acte où les ténèbres engloutissent littéralement et progressivement Mastroianni. Il y a bien des tentatives de traduire sa lassitude et son détachement par l'utilisation du son ou de la lumière mais ces effets ne sont pas assez poussés pour être palpable. D'un côté, j'ai trouvé que cette "indécision" de la réalisation appuyait presque le propos du film à l'image du procès où Meursault est totalement absent et déconnecté des enjeux, peut-être conscient que les dés étaient déjà lancés et que la résistance est inutile puisque incompréhensible. Par contre, c'est sûr qu'il y a des moments où Visconti ne sait pas quoi faire de son matériel et se contente de balancer les zooms mécaniquement comme lors du premiers tiers assez agaçant.
Je sais pas si Mastroianni a compris ou non le personnage du livre mais je n'ai pas été dérangé par son interprétation tout en admettant que c'est loin d'être son meilleur rôle.
Un film assez curieux, bancal, maladroit mais qui m'a souvent fasciné dans l'ensemble, sans doute plus en effet pour son scénario et son personnage central insaisissable que pour la pellicule imprimée. Reste que cet opus de Visconti ne mérite pas cette quasi invisibilité. Il y a un problème de droit ou c'est juste sa piètre réputation qui joue contre-lui ?