L'expert et mère

J’avais envie de voir L’expert de Hong-Kong à partir du moment où j’en ai vu un très court extrait dans la superbe vidéo d’Every frame a painting sur Jackie Chan. J’ai un peu déchanté en lisant et en entendant dire, en gros, que c’était Trois hommes et un couffin, mais en film d’action… M’enfin s’il y avait de bonnes scènes d’action, peu importe.

Jackie incarne Thongs (c’est quoi ce nom, putain ?), un cambrioleur qui enchaîne les casses avec son colocataire, Octopus, mais ils mènent tous deux une vie très dépensière. Jackie parce qu’il perd tout au jeu, et son collègue parce qu’il veut vivre dans le luxe et couvre de cadeaux sa maîtresse. Son épouse l’espionne dans des costumes grotesques, et lui la force à avorter… c’est un véritable connard, mais le film s’attend à ce qu’on en rie.
Jackie quant à lui n’est pas crédible en homme souffrant de son addiction au jeu, parce que c’est trop pris à la légère, et on ne sent aucune menace réelle de la part de ses créanciers.
Ce qui est un peu plus plombant, c’est que le héros fait honte à sa famille, mais ça ne marche pas vraiment non plus parce que de toute façon Chan est trop vieux pour son rôle, celui du type qui a pris une mauvaise voie dans la vie malgré les efforts de ses parents pour lui offrir une bonne éducation, etc. Alors que l’acteur a quand même passé la cinquantaine. On dirait qu’on veut le faire passer pour un jeune, en l’accolant à un acteur secondaire qui a la trentaine, avec pour environnement un appartement d’étudiant rempli de figurines Star wars et Hellboy et de posters de DMX et Slipknot.
Auprès du duo, il y a également leur propriétaire, qui sert de tête pensante pour leurs cambriolages, marié à une folle qui choie un bébé en plastique depuis la perte de son enfant 20 ans plus tôt. Alors qu’il veut se retirer des affaires criminelles, le type se fait voler toutes ses économies… et se voit obligé de placer ses hommes sur une affaire de kidnapping de bébé.

Les héros se retrouvent à devoir s’occuper du nouveau-né, et le font comme des manches. Et si le film se montrait déjà ouvertement comique, c’est à partir de là que ça en devient vraiment embarrassant, à voir Jackie et son pote faire les guignols pour amuser l’enfant.
Avec L’expert de Hong-Kong, on en revient à l’humour lourdingue des films Hong-Kongais de Chan des 80’s, avec des blagues complètement nulles, et même certaines d’un registre pipi-caca : le bébé pisse sur un personnage, un autre réceptionne une couche et la merde l’éclabousse…
Non seulement certains gags sont éculés, mais en plus les acteurs en font des tonnes.
Toutefois, plus les comédies de Jackie Chan sont récentes, moins elles me font grincer des dents. Disons que l’humour ne m’est pas aussi insupportable que dans Le flic de Hong-Kong par exemple (où c’est carrément l’horreur), et j’en viens même à rire parfois, même si ça reste complètement con et poussif.
Les effets de mise en scène servent aussi à appuyer le côté comique du film, ça donne des accélérés pourris et des transitions kitschs… en revanche le montage dynamique n’est pas désagréable.
Les moments de niaiserie sont tout aussi ridicules que ceux comiques. Le film fait des changements de ton brutaux, et les moments censés être dramatiques ne marchent pas du tout, pour certains parce que les acteurs surjouent toujours à mort ; ce qui change, c’est qu’il y a une musique dramatique en accompagnement.
Il y a toutefois des séquences, vers la fin, où le drame fonctionne, Chan se donne à fond, il y a même de la tension… et puis c’est foutu en l’air pas une idée d’un immense n’importe quoi (réanimation façon MacGyver).

Mais, mais… L’expert de Hong-Kong est riche en cascades. Quand je vois certains Jackie Chan, je regrette que l’usage des capacités de la star se limite à une ou deux séquences d’action seulement, et dans lesquelles on se contente d’une simple cabriole. C’est comme, euh… employer Michel-Ange pour lui faire repeindre un mur.
Alors qu’ici, le personnage de Jackie virevolte au quotidien ; s’il doit échapper à un type à qui il doit du fric, même si ça ne dure que 5 secondes, il lui saute par-dessus dans les escaliers.
Le film exploite vraiment bien les capacités de ses acteurs, et pas seulement Jackie d’ailleurs puisque d’autres ont l’occasion de briller, mais l’acteur-phare suscite vraiment l’émerveillement face à ses prouesses, que l’on fait durer : on se demande déjà au début d’une cascade comment il fait tel ou tel truc, et ça se poursuit, l’acteur enchaîne les exploits (cette dégringolade des climatiseurs, cette escapade sur les montagnes russes !).
Et ces cascades de dingue sont exactement comme je les aime chez Jackie : c’est impressionnant, inventif, ça se sert de l’environnement, et c’est drôle (voire même hilarant).
D'ailleurs il y a comme décors plusieurs intérieurs modernes, où il y a pas mal à faire, avec des meubles mouvants ou parois coulissantes.
J’ai été un peu déçu quand même qu’on voie l’usage d’un fond vert, quand le héros échappe à plusieurs crashs de voiture, mais bon… j’imagine qu’il se permet de risquer sa vie un peu, mais pas trop. Etre à deux doigts de se faire écraser dans Chinese zodiac ou Who am I, c’était déjà pas mal.

Un bon Jackie Chan, surtout que je m’attendais à bien pire en terme d’humour.