« Une année, un film » : L’Extravagant Mr Ruggles, réalisé par Leo McCarey et sorti le 5 février 1935.
Après la mélancolie qu’inspirait L’Atalante, il paraissait bon de retrouver un peu le sourire avec une comédie américaine d’époque. L’Extravagant Mr Ruggles bénéficie d’une belle réputation, étant notamment inscrit au National Film Registry en 2014.
L’Extravagant Mr Ruggles ou « Ruggles of Red Gap » de son vrai nom, nous fait rencontrer le majordome Ruggles, fidèle serviteur du comte de Burnstead. En 1908, alors résidant à Paris, le comte joue une partie de poker arrosée avec un ami américain, et mise son valet, qu’il perd, et qu’il doit céder à Mr Floud, le susnommé ami américain. Ruggles, habitué à l’aristocratie européenne, très codifiée et traditionaliste, va découvrir la société américaine, bien différente.
L’Extravagant Mr Ruggles est clairement une apologie de l’American Dream et des valeurs fondamentales dont se targue la société américaine, c’est-à-dire l’égalité et la liberté pour tous les individus, quelle que soit leur condition. Ruggles, lui, a été habitué à être un valet fidèle, servant son maître sans coup férir, et n’accordant que peu de crédit à sa propre personne. Pour lui, il appartient à une famille de valets, et il est voué à être un valet, tant dans sa profession que dans ses actes. Or, Mr Floud, son nouveau maître, est un véritable bout-en-train, et il ne voit pas Ruggles comme un valet, mais comme un ami avec lequel il agit avec politesse et respect, ce qui a pour mérite de surprendre notre majordome British au flegme imperturbable. L’Extravagant Mr Ruggles se sert des différences entre les mœurs anglaises et américaines pour créer un comique de situation, mais aussi permettre au personnage de Ruggles d’évoluer et de modifier sa perception du monde qui l’entoure, ainsi que de réfléchir sur sa propre condition.
Mr Floud entraîne Ruggles dans un véritable voyage initiatique, où il lui apprend à faire la fête (comme dans l’excellente scène où ils prennent une véritable cuite dans un café parisien, métamorphosant totalement le personnage de Ruggles), à prendre ses propres initiatives, et à ne pas se considérer systématiquement comme inférieur à ses pairs. C’est donc une société tout à fait différente que Ruggles découvre, une société fondée sur les valeurs de la démocratie américaine, dont le film fait ouvertement l’éloge.
Le résultat proposé est une sympathique comédie qui joue sur les contrastes entre personnage et le comique de situation, généré principalement par les mimiques et le jeu de l’excellent Charles Laughton, qui incarne parfaitement le flegme britannique et inspire d’emblée la sympathie. Une belle comédie sympathique d’un temps qui paraît lointain, mais qu’il ne faut pas oublier !
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