Suite au succès de Le Mur Invisible qui abordait l'intolérance, Elia Kazan se voit confier L'Héritage de la Chair, prenant ainsi la succession de John Ford dont la vision des noirs était différente de celle de Darryl F. Zanuck (d'après ce dernier), et il est ici question d'une afro-américaine à la peau assez claire cessant de se faire passer pour une blanche.
En voilà un sujet assez compliqué à traiter (rappelons que l'on est en 1949), surtout après le décevant Le Mur Invisible déjà du tandem Zanuck/Kazan qui traitait de l'antisémitisme avec une certaine lourdeur, et à nouveau, ils se montrent plutôt décevants. Le problème de L'Héritage de la Chair, c'est qu'on n'y croit jamais réellement, tout ou presque sonne faux, à commencer par une actrice principale guère convaincante (mais jamais aidée par l'écriture de son personnage), tout comme la galerie de personnages dans son ensemble, où il est plus souvent question de caricatures qu'autres choses.
Le thème du raciste est assez mal traité, comme dans son précédent film, Kazan se montre démonstratif, à l'image du changement de comportement des personnages envers l'héroïne. C'est dommage car le scénario restait intéressant malgré des ficelles un peu grosse ainsi qu'un côté trop prévisible, notamment dans le final, mais il n'est jamais réellement sublimé, Kazan n'apportant ni une richesse intellectuelle, ni une ambiance, et encore des moins des sensations envers les personnages et enjeux.
Néanmoins, Kazan montre déjà un minimum de savoir-faire, notamment techniquement ainsi que dans la façon de diriger son récit voire ses comédiens (surtout pour les seconds-rôles). Certaines séquences témoignent de la force et puissance de ce cinéaste, notamment visuelles, bien que ce soit tout de même trop insuffisant. L'héritage de la Chair rappelle aussi que cela a toujours été difficile de traiter de certaines causes, trouver le ton juste et nuancé est compliqué, même si ça reste courageux d'aborder ces thématiques alors que nous sommes en 1949 et que le pays est toujours fortement gangrené par le racisme.
Prenant la suite de John Ford, Elia Kazan signe avec L'Héritage de la Chair une oeuvre compliquée et décevante, où on a l'impression de le voir enchaîné à son producteur et livrer une oeuvre impersonnelle, voulant servir la cause de l'anti-racisme mais tombant dans la lourdeur et le démonstratif, malgré quelques indéniables qualités.